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CHAPITRE PREMIER.

se compose donc de vingt petits Kalpas, et le grand Kalpa, de quatre moyens Kalpas ou de quatre-vingts petits Kalpas[1].

L’exposé que Schmidt a donné des Kalpas d’après les Buddhistes mongols, se rapproche beaucoup de celui que Deshauterayes et Rémusat ont emprunté aux Chinois ; il en diffère cependant par quelques points que j’examinerai tout à l’heure. Un Mahâkalpa se compose de quatre moyens Kalpas ; un moyen Kalpa embrasse vingt petits Kalpas : d’où il résulte que la somme d’un Mahâkalpa est de quatre-vingts petits Kalpas[2]. C’est la longueur de la vie humaine qui détermine la durée de ces Kalpas, et qui, par ses accroissements et ses diminutions successives, donne lieu aux dénominations diverses de Kalpas de la renaissance, de la stabilité et de la destruction. La vie des hommes, qui au commencement de la période de la renaissance se composait d’un Asam̃khyêya, c’est-à-dire, d’un nombre incalculable d’années, descend à quatre-vingt mille ans pendant les dix-neuf Kalpas succédants au premier Kalpa de même ordre, dont l’ensemble forme ce que Schmidt appelle Kalpa der Gründung, ou de la fondation, c’est-à-dire le Kalpa pendant lequel le monde se reforme de nouveau[3]. À ce Kalpa succède celui de la stabilité ; pendant chacune des vingt sous-divisions de cette période, la vie des hommes descend de quatre-vingt mille ans à dix ans, pour remonter aussitôt à la durée première d’où elle est partie. Le Kalpa de la stabilité est remplacé par le Kalpa de la destruction, lequel passe par les mêmes phases que le Kalpa de la renaissance, mais en les suivant en sens inverse[4]. Enfin, à ce Kalpa où l’existence du monde est en décadence, succède le quatrième et dernier Kalpa, celui du vide, pendant lequel l’anéantissement du monde reste à l’état permanent ; il n’est pas besoin d’ajouter qu’il a une durée égale à celle des autres Kalpas qui le précèdent. N’oublions pas de dire que les éléments tels que le feu, l’eau, le vent, sont les agents de la destruction du monde. Ils se succèdent et s’entremêlent dans des combinaisons définies par les Buddhistes, et dont la réunion forme un total de soixante-quatre destructions, véritable cycle qui recommence aussitôt après qu’il est terminé[5].

Ces détails, comme je l’annonçais tout à l’heure, s’accordent dans leurs traits principaux avec ceux que nous devons aux extraits de Deshauterayes et de Rémusat. Ils en diffèrent toutefois en un point d’une grande importance, savoir la détermination de la durée initiale de la vie humaine, au moment où le monde va renaître. Selon Rémusat, les hommes auraient vécu alors quatre-vingt-quatre mille années, tandis que, selon Schmidt, le nombre des années de leur existence aurait été incalculable, ou, pour parler comme les Buddhistes, aurait été un Asam̃khyêya. Schmidt n’a pas manqué de relever cette divergence, et il n’a pas hésité à la mettre sur le compte de quelque erreur commise par Rémusat, et on devrait ajouter, par Deshauterayes son devancier. Schmidt conteste également, et selon toute apparence avec juste raison, les chiffres assignés par

  1. Deshauterayes, Recherches sur la religion de Fo, dans Journ. asiat. t. VIII, p. 181 et 182 ; Rémusat, Essai sur la cosmogonie buddhique, primitivement inséré dans le Journal des Savants, année 1831, et reproduit dans les Mél. post. et suiv. p. 116 et 117.
  2. Ueber die tausend Buddhas, dans Mém. de l’Acad. de Saint-Pétersbourg, t. II, p. 59.
  3. Ibid. t. II, p. 60 et 82.
  4. Ibid. t. II, p. 60 et 61.
  5. Ibid. t. II, p. p. 62.