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CHAPITRE XIX.

malveillance, et l’injuriaient. « Pourquoi ce Religieux nous dit-il, sans que nous l’interrogions, qu’il n’a pas la pensée de nous mépriser ? Il nous traite avec mépris cependant, puisqu’il nous prédit que nous parviendrons à l’état suprême de Buddha parfaitement accompli, état auquel nous ne pensons pas et que nous ne désirons pas. » Ce Bôdhisattva, ô Mahâsthâmaprâpta, passa ainsi un grand nombre d’années exposé aux injures et aux outrages. Et cependant il ne s’indignait contre personne,f. 200 b. il n’en concevait aucune pensée de malveillance ; et ceux qui, quand il leur parlait ainsi, lui jetaient des mottes de terre, ou le frappaient à coups de bâton, il leur criait de loin en élevant la voix : Je ne vous méprise pas. Ces Religieux et ces fidèles des deux sexes, qui étaient remplis d’orgueil, l’entendant répéter sans cesse, Je ne vous méprise pas, finirent par lui donner le nom de Sadâparibhûta (celui qui est toujours méprisé).

Or ce Bôdhisattva Mahâsattva Sadâparibhûta, quand la fin de son temps approcha, quand vint l’instant de sa mort, entendit cette exposition de la loi du Lotus de la bonne loi. Cette exposition de la loi était faite par le bienheureux Tathâgata Bhîchma…râdja, vénérable, etc., en vingt fois vingt centaines de mille de myriades de kôṭis de stances. Le Bôdhisattva Mahâsattva Sadâparibhûta, quand approcha l’instant de sa mort, en entendit le son sortir du haut du ciel. Ayant entendu cette voix qui partait du ciel, sans qu’il parût personne qui la prononçât, il saisit cette exposition de la loi et acquit chacune des perfections dont j’ai parlé, celles de la vue, de l’ouïe, de l’odorat, du goût, du corps et de l’intellect. À peine les eut-il acquises, que recevant comme bénédictionf. 201 a. la conservation de la vie pendant vingt autres centaines de mille de myriades de kôṭis d’années, il se mit à expliquer cette exposition du Lotus de la bonne loi. Et tous ces êtres pleins d’orgueil, Religieux ou fidèles des deux sexes, auxquels il disait autrefois : Je ne vous méprise pas, et qui lui avaient donné le nom de Sadâparibhûta, ces êtres, après avoir vu la grandeur de la force de ses facultés surnaturelles, celle de ses vœux, celle de sa puissance, celle de sa sagesse, se réunirent tous sous sa conduite pour entendre la loi. Tous ces êtres, et beaucoup d’autres centaines de mille de myriades de kôṭis de créatures, furent conduits à l’état suprême de Buddha parfaitement accompli.

Ensuite, ô Mahâsthâmaprâpta, ce Bôdhisattva Mahâsattva, étant sorti de ce monde, combla de joie [dans d’autres existences] vingt centaines de