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renfermé mon intelligence dans mon cœur ; et lorsque je reconnus que mon regard ne pouvait le découvrir, je tombai dans le trouble du découragement.

21. Pendant que je m’épuisais en [vains] efforts dans la forêt, Bhagavat auquel mes paroles ne pouvaient s’adresser [parce qu’il était invisible], me parla ainsi d’une voix douce et profonde, comme pour calmer mon chagrin.

22. Ami, tu ne dois pas me voir dans cette vie, car je suis insaisissable au regard des Yôgins imparfaits dont les fautes ne sont pas complètement effacées.

23. La forme que je t’ai laissé voir un instant avait pour but de t’inspirer de l’amour pour moi ; celui qui m’aime, se purifiant peu à peu, se délivre des désirs qu’il a dans le cœur.

24. La soumission que tu as témoignée, même pendant peu de temps, à des hommes vertueux, a fixé sur moi ton intelligence d’une manière solide ; aussi, abandonnant ce monde méprisable, tu iras prendre place au nombre de mes serviteurs.

25. Par ma faveur, ton intelligence fortement attachée à moi, ainsi que ta mémoire, ne seront jamais exposées à faillir, même au temps de la création et de la destruction des êtres.

26. Ainsi parla ce grand Être, le souverain Seigneur, dont le signe est le ciel, quoique [en réalité] il n’ait pas de signe, et il se tut. Et moi, inclinant la tête devant celui qui surpasse tout ce qu’il y a de plus grand, je lui adressai mon hommage en reconnaissance de sa miséricorde.

27. Récitant les noms de l’Être infini, chantant ses bienheureux mystères et ses actions, je parcourais la terre sans honte, la joie dans le cœur, libre de tout lien, sans passion, sans envie, et j’attendais la mort.

28. Je vivais ainsi pur, affranchi de tous les liens, l’esprit exclusivement occupé de Krĭchṇa, quand, au temps marqué, la mort, comme un éclair parti d’un nuage, vint tout à coup me frapper.

29. Au moment où j’allais me réunir à ce corps pur, soumis à