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DU BUDDHISME INDIEN.

où il se trouve], au Nirvâṇa complet, parce qu’il n’a pas acquis les dix forces d’un Tathâgata, les quatre intrépidités d’un Tathâgata, les dix-huit conditions distinctes d’un Buddha. Aussi est-ce là, ô Bhagavat, ce qu’il faut reconnaître pour la Perfection de la sagesse du Bôdhisattva Mahâsattva.

Encore autre chose, ô Bhagavat. Le Bôdhisattva qui marche dans la Perfection de la sagesse, qui la médite, doit penser, doit réfléchir ainsi : Qu’est-ce que cette Perfection de la sagesse, et à qui appartient-elle ? Eh quoi ? est-ce que la Perfection de la sagesse serait une condition qui n’existe pas, qui ne se trouve pas ? Si pensant et réfléchissant ainsi, l’esprit du Bôdhisattva ne se dissout pas, ne se fond pas [etc. comme plus haut jusqu’à :] s’il n’éprouve pas de terreur, ce Bôdhisattva doit être reconnu comme n’étant pas privé de la Perfection de la sagesse.

Alors Çâriputtra parla ainsi à Subhûti : Pourquoi donc, Subhûti, le Bôdhisattva doit-il être reconnu comme n’étant pas privé de la Perfection de la sagesse, quand la forme est privée de la propre nature de forme, et qu’il en est de même de la sensation, de l’idéo, des concepts, de la connaissance, qui tous sont privés de nature propre ; quand l’omniscience elle-même est privée de la nature propre d’omniscience ?

Cela dit, Subhûti parla ainsi à Çâriputtra : C’est cela, Çâriputtra, c’est cela même. Oui, la forme est privée de la nature propre de forme ; et il en est de même de la sensation, de l’idée, des concepts, de la connaissance, qui sont tous privés de nature propre. De même, ô Çâriputtra, la Perfection de la sagesse elle-même est privée de nature propre, et il en est ainsi de l’omniscience. La Perfection de la sagesse est privée des attributs de Perfection de la sagesse. L’attribut lui-même est privé de la nature propre d’attribut. Le sujet lui-même est privé de la nature propre de sujet. La nature propre elle-même est privée des attributs de nature propre.

Cela dit, Çâriputtra parla ainsi à Subhûti : Est-ce que le Bôdhisattva, ô Subhûti, qui étudiera ainsi parviendra jusqu’à l’omniscience ? Oui, Çâriputtra, répondit Subhûti ; c’est cela même ; le Bôdhisattva qui étudiera ceci parviendra jusqu’à l’omniscience. Pourquoi cela ? C’est que, ô Çâriputtra, toutes les conditions sont non-produites, incréées. Le Bôdhisattva, ô Çâriputtra, qui marche dans cette conviction, s’approche de l’omniscience. À mesure qu’il s’approche de l’omniscience, alors s’approche en proportion, pour la maturité des créatures, la perfection du corps et de l’esprit, la perfection des attributs, la perfection de la terre du Buddha, et [l’état de] Buddha lui-même. C’est ainsi, ô Çâriputtra, que le Bôdhisattva marchant dans la Perfection de la sagesse s’approche de l’omniscience.