Page:Burnouf - Introduction à l’histoire du bouddhisme indien.djvu/411

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
369
DU BUDDHISME INDIEN.

ressens pas le feu de la colère ; mon cœur n’a que de la bienveillance pour ma mère, qui a donné l’ordre de m’arracher les yeux.

Puissent, au nom de la vérité de ces paroles, mes yeux redevenir tels qu’ils étaient auparavant ! À peine eut-il prononcé ces paroles, que ses yeux reparurent avec leur premier éclat.

Cependant le roi Açôka, irrité contre Tichya rakchitâ, la fit jeter dans un lieu de torture où elle mourut par le feu ; et il fit massacrer les habitants de Takchaçilâ.

Les Religieux, qui concevaient quelques doutes, interrogèrent ainsi le respectable Sthavira Upagupta qui tranche tous les doutes : Quelle action avait donc commise Kunâla, pour que les yeux lui eussent été arrachés ? Le Sthavira répondit : Écoutez, respectables personnages. Jadis, dans le temps passé, il y avait à Bénarès un certain chasseur qui allait dans l’Himavat, et y tuait des animaux sauvages. Un jour qu’il s’était rendu dans la montagne, il surprit au fond d’une caverne cinq cents gazelles qui s’y trouvaient rassemblées, et il les prit toutes dans un filet. Il fit alors cette réflexion : Si je les tue, je serai embarrassé de toute cette viande. C’est pourquoi il creva les yeux aux cinq cents gazelles. Ces animaux, privés de la vue, étaient incapables de s’échapper. C’est ainsi qu’il creva les yeux à plusieurs centaines de gazelles.

Que pensez-vous de cela, ô Religieux ? Ce chasseur, c’était Kunâla lui-même. Parce qu’alors il creva les yeux à plusieurs centaines de gazelles, il a souffert pour prix de cette action les douleurs de l’Enfer pendant plusieurs centaines de mille d’années. Puis, pour achever d’expier le reste de sa faute, il a eu les yeux arrachés pendant cinq cents existences en qualité d’homme. Mais quelle action avait-il faite pour mériter de renaître dans une famille élevée, d’avoir un extérieur agréable et de connaître les vérités ? Écoutez, respectables personnages.

Jadis, dans le temps passé, quand la vie des hommes était de quarante-quatre mille ans, il parut dans le monde un Buddha parfait nommé Krakutchhanda. Quand il eut rempli complètement tous les devoirs d’un Buddha, il entra dans le domaine du Nirvâṇa, où il ne reste rien des éléments de l’existence. Un roi nommé Açôka fit construire pour lui un Stûpa fait de quatre sortes de pierres précieuses. Mais après la mort d’Açôka, son trône fut occupé par un souverain qui n’avait pas la foi. Les pierres précieuses furent dérobées par des voleurs, qui ne laissèrent que la terre et le bois. Le peuple, qui s’était réuni dans cet endroit, voyant le Stûpa détruit, se mit à fondre en larmes. Or, le fils d’un chef d’artisans se trouvait en ce moment-là [parmi le peuple]. Ce jeune homme demanda : Pourquoi pleure-t-on ? Le Stûpa de Krakutchhanda le Buddha, lui répondit la