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INTRODUCTION À L’HISTOIRE


du roi Açôka. Et à l’instant la Divinité parut sous sa propre forme auprès du Sthavira Upagupta, et tenant ses mains réunies, elle lui dit : Sthavira, que me commandes-tu ? Alors le Sthavira se tournant vers Açôka : La voilà, ô grand roi, la Divinité qui a vu Bhagavat au moment de sa naissance. Réunissant aussitôt les mains en signe de respect, le roi s’adressa ainsi à cette Divinité : Tu l’as donc vu au moment de sa naissance, ce sage dont le corps était marqué des signes de la beauté, et dont les grands yeux ressemblaient au Lotus ! Tu as donc entendu les premières paroles du Héros d’entre les hommes, les paroles agréables qu’il prononça dans ce bois ! Oui, répondit la Divinité, je l’ai vu au moment où il venait de naître, le premier des hommes, dont le corps était brillant comme l’or ; je l’ai vu au moment où il faisait sept pas, et j’ai entendu les paroles du Maître. Dis-moi donc, ô Divinité, reprit le roi, quel était l’éclat de Bhagavat à l’instant où il vint au monde. Je ne puis, lui dit la Déesse, l’exprimer par des paroles ; mais juges-en par un seul mot :

Brillante d’une lumière miraculeuse, resplendissante comme l’or, agréable aux yeux, la terre, dans ce système des trois mondes où règne Indra, trembla ainsi que ses montagnes, jusqu’aux rivages de l’océan, semblable à un vaisseau porté sur la grande mer.

Le roi, après avoir donné cent mille [Suvarṇas] aux gens du pays, fit élever en cet endroit un Stûpa et se retira.

Le Sthavira Upagupta ayant ensuite conduit le roi à Kapilavastu, lui dit en étendant la main droite : C’est en ce lieu, ô grand roi, que le Bôdhisattva a été présenté au roi Çuddhôdana [son père]. À la vue de ce corps que paraient les trente-deux signes caractéristiques d’un grand homme, et dont ses regards ne pouvaient se détacher, Çuddhôdana tomba de toute sa hauteur aux pieds du Bôdhisattva. Voici, ô grand roi, la Divinité de la famille, nommée Çâkya vardha (celle qui fait prospérer les Çâkyas) ; c’est à elle qu’a été présenté le Bôdhisattva aussitôt après sa naissance, pour qu’il adorât le Dieu. Mais ce furent les Divinités qui toutes se jetèrent aux pieds du Bôdhisattva. Aussi le roi Çuddhôdana s’écria-t-il : Cet enfant est un Dieu pour les Divinités elles-mêmes ; de là vint qu’on lui donna le nom de Dêvâtidêva (Dieu supérieur aux Dieux)[1].

C’est ici, ô grand roi, que le Bôdhisattva fut présenté aux Brâhmanes clair-

    ici par grâce, et l’on comprend sans peine que les Tibétains l’aient pris, dans de tels passages, pour synonyme de foi.

  1. Cette légende est encore le résumé sommaire du chapitre correspondant du Lalita vistara. (Lalita vistara, ch. VIII, f. 67 sqq. de mon man.) Il faut voir aussi le récit de la naissance de Çâkya, traduit du chinois par Klaproth. (Foe koue ki, p. 221.)