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INTRODUCTION À L’HISTOIRE


populaire, et dont les heureuses tentatives furent imitées et surpassées par Honigberger et surtout par Masson, une tradition non interrompue de près de dix-sept siècles consacre l’existence, et on peut le dire en général, la destination de ces curieux édifices. Qui n’a pas lu les descriptions qu’en ont données les antiquaires dont je rappelle les noms ? Qui ne sait quelle gloire se sont acquise les Prinsep, les Lassen, les Raoul-Rochette, les Wilson et d’autres encore, en expliquant et en classant les médailles trouvées dans l’intérieur ou dans le voisinage des Stûpas ? Aucun des sujets qui touchent à l’Inde n’a excité en Europe une aussi vive curiosité ; aucun n’a été aussi fécond en conséquences positives pour l’histoire ancienne de l’Inde à partir du iiie siècle avant notre ère. Les beaux travaux auxquels je fais allusion en ce moment sont connus de tous mes lecteurs, et il suffit au dessein du présent ouvrage que je les rappelle en indiquant la véritable destination des monuments qu’ils décrivent.

Cette destination est positivement marquée dans les légendes qui essayent de faire remonter le culte des reliques comme tout le reste, non pas seulement au temps de Çâkya, mais jusqu’à l’époque des Buddhas, mythologiques selon moi, qui l’ont précédé, il y a des milliards de siècles. Les livres du Népâl sont pleins du récit des hommages rendus aux monuments dépositaires des reliques de ces Buddhas ; et parmi les Sûtras, ceux que je regarde comme les plus modernes célèbrent sans fin l’apparition de ces Stûpas merveilleux, qui s’entr’ouvrent miraculeusement, et qui laissent voir aux spectateurs surpris ou une précieuse relique, ou la personne même tout entière du Buddha qu’ils recouvrent. On le voit, là, tout comme en ce qui touche à l’image de Çâkya, le culte, sans changer d’objet, s’est développé sur un plus vaste théâtre ; et l’invasion de la mythologie dans le Buddhisme a donné à un fait simple et naturel les proportions gigantesques de la fable. Suivant les légendaires, ce serait Çâkyamuni lui-même qui aurait ordonné qu’on rendît à sa dépouille des honneurs semblables à ceux auxquels a droit un monarque souverain ; et c’est conformément

    sanscrit ; il vient certainement du sanscrit Stûpa, qui signifie monceau, et il a passé, pour prendre cette forme altérée, par le pâli Thûpa, qui a le même sens. Ce mot est populaire dans le Pendjab et dans l’Afghanistan, et il a paru pour la première fois dans l’ouvrage d’Elphinstone sur le Caboul. (Elphinstone, Account of Kabul, p. 78.) Depuis lors, on n’a cessé de l’appliquer aux monuments buddhiques en forme de coupole ; et cette application est d’autant plus irréprochable, que ces monuments sont nommés Stûpas dans les livres du Nord, et Thûpas dans ceux du Sud. C’est à M. Masson que l’on doit les descriptions les plus exactes et les plus détaillées de la forme extérieure et de la disposition intérieure des Topes. (Memoir on the Topes, dans Ariana antiqua, p. 55 sqq.) Ces descriptions se rapportent exclusivement aux monuments élevés à l’ouest de l’Indus, et en particulier à ceux de l’Afghanistan ; mais M. Wilson a bien fait voir que les Topes de l’Inde centrale et les Dagobs de Ceylan, du Pégu et d’Ava sont, quant à l’extérieur et à l’intérieur, des monuments de même nature. (Ariana antiqua, p. 38 sqq.)