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INTRODUCTION À L’HISTOIRE


désir du roi, et fit avec le plus précieux bois de santal une statue qui représentait le Buddha debout et les mains réunies dans la position d’un homme qui enseigne. Cette légende, il est vrai, ne prouve pas plus que ne fait un miracle, et elle est probablement en partie de l’invention des Mongols ; mais je puis citer un fragment d’un Avadâna, dont le témoignage est plus instructif.

Rudrâyaṇa, roi de Rôruka, venait d’envoyer à Bimbisâra, roi de Râdjagrĭha, une armure douée de vertus merveilleuses et toute couverte de joyaux.

« À la vue de ce présent, le roi Bimbisâra fut frappé de surprise ; il fit appeler des hommes experts à juger des pierres précieuses et leur dit : Fixez le prix de cette armure. Ô roi, répondirent les joailliers, chacune de ces pierres est hors de prix ; c’est une règle que quand on ne peut pas déterminer le prix d’une chose, on en fixe la valeur à dix millions [de pièces]. Le roi Bimbisâra dit alors avec chagrin : Quel présent pourrai-je envoyer en retour au roi de Bôruka ? Puis il fit cette réflexion : Le bienheureux Buddha [est maintenant dans le royaume] ; il connaît par sa science sans égale ce que c’est qu’un roi généreux ; il possède des moyens surnaturels ; j’irai [auprès de lui], j’irai trouver le bienheureux Buddha. Ayant donc pris l’armure, il se rendit au lieu où se trouvait Bhagavat ; et quand il y fut arrivé, ayant salué, en les touchant de la tête, les pieds de Bhagavat, le roi Bimbisâra lui parla ainsi : Dans la ville de Rôruka, seigneur, habite un roi nommé Rudrâyaṇa ; c’est mon ami, quoique je ne l’aie jamais vu ; il m’a envoyé en présent une armure formée de cinq parties. Quel présent lui ferai-je en retour ? Fais tracer sur une pièce d’étoffe, lui répondit Bhagavat, la représentation du Tathâgata, et envoie-la-lui en présent.

Bimbisâra fit appeler des peintres et leur dit : Peignez sur une pièce d’étoffe l’image du Tathâgata. Lee Buddhas bienheureux ne sont pas faciles à aborder ; c’est pourquoi les peintres ne purent saisir l’occasion de [peindre] Bhagavat. Ils dirent donc à Bimbisâra : Si le roi donnait un repas à Bhagavat dans l’intérieur de son palais, il nous serait possible de saisir l’occasion de [peindre] le Bienheureux. Le roi Bimbisâra ayant dont invité Bhagavat à venir dans l’intérieur de son palais, lui donna un repas. Les bienheureux Buddhas sont des êtres qu’on ne se lasse pas de regarder. Quel que fût celui des membres de Bhagavat que regardaient les peintres, ils ne pouvaient se lasser de le contempler. C’est pourquoi ils ne purent saisir le moment de le peindre. Bhagavat dit alors au roi : Les peintres auront de la peine, ô grand roi ; il leur est impossible de saisir le moment de [peindre le] Tathâgata, mais apporte la toile. Le roi l’ayant apportée, Bhagavat y projeta son ombre et dit aux peintres :