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DU BUDDHISME INDIEN.


des instruments et de la récitation de chants et de prières pieuses. Du reste, aucune trace de sacrifice sanglant ni d’offrandes transmises à la Divinité par l’intermédiaire du feu, d’abord parce que le premier des préceptes fondamentaux de la morale buddhique est de ne tuer rien de ce qui vit, ensuite parce que la théorie du Vêda, suivant laquelle les Dieux se nourrissent de ce qu’on offre au feu, qui est leur messager sur la terre, est radicalement incompatible avec les idées buddhiques. Le culte, en effet, ne s’adresse pas chez les Buddhistes à un Dieu unique, ou à une foule d’être divins que l’imagination du Brâhmane entrevoit, le premier caché dans le monde, les seconds dispersés dans les éléments ; il n’a que deux objets : la représentation figurée de Çâkyamuni, le fondateur de la doctrine, et les édifices qui renferment une portion de ses os. Une image et des reliques, voilà tout ce qu’adorent les Buddhistes ; aussi chez eux le culte s’appelle-t-il Pûdjâ ou honneur, tandis que chez les Brâhmanes il se nomme Yadjña ou sacrifice.

Ce culte si simple est le seul qui paraisse dans les textes du Népâl ; il n’y a, sous ce rapport, presque aucune distinction à faire entre les diverses classes de livres que j’ai signalées dans la seconde partie du présent Mémoire ; seulement les Sûtras développés justifient leur titre en ce point comme dans tous les autres. Ils racontent avec diffusion la pompe et la richesse des offrandes ; mais, sauf les observations que je ferai plus bas, ils ne changent rien à la nature des objets d’adoration qui figurent dans les Sûtras et dans les légendes dont nous nous occupons surtout en ce moment. Là, comme dans les traités que je crois les plus rapprochés de la prédication de Çâkya, ce qu’on adore, c’est l’image du Buddha représenté assis, les jambes croisées, dans l’attitude de la méditation ou de l’enseignement ; c’est encore le monument qui renferme une partie de ses reliques.

Il est fort intéressant de voir comment les rédacteurs des légendes essaient de faire remonter jusqu’au temps de Çâkya lui-même l’origine de ce culte, qui n’a certainement pris naissance qu’après lui. L’adoration de la personne visible de Çâkya n’est nulle part indiquée, car Çâkya, tant qu’il vit, n’est toujours qu’un homme, même pour ses disciples les plus fervents ; mais celle de son image se montre déjà dans des légendes tout à fait caractéristiques et dont l’intention est manifeste. J’ai déjà fait allusion au voyage miraculeux que Çâkyamuni fit au ciel, et j’ajoute ici que Udâyana Vatsa, roi de Kâuçambhî, pria un des premiers disciples de Çâkya de reproduire pour lui l’image du Maître, qui tardait trop à redescendre sur la terre[1]. Le disciple se rendit au

  1. Geschichte der Ost-Mongol, p. 15.