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DU BOUDDHISME INDIEN.


réunion des cinq cents fleuves, il y puisa de l’eau dans le vase ; revenant ensuite au lieu où se trouvait Bhagavat, il lui présenta le vase plein d’eau. Bhagavat le prit et le but.

Le respectable Mahâ Mâudgalyâyana fit alors cette réflexion : Le Bienheureux a dit précédemment : Ils font, ô Religieux, une chose bien difficile pour leur enfant, le père et la mère qui le nourrissent, qui l’élèvent, qui le font grandir, qui lui donnent à boire leur lait, qui lui font voir les spectacles variés du Djambudvîpa. Supposons, d’un côté, un fils qui passe cent années entières à porter sa mère sur ses épaules, ou bien qui lui assure les plaisirs que procurent la puissance et la domination, en lui donnant toute espèce de biens, par exemple tout ce que la grande terre renferme de joyaux, de perles de lapis-lazuli, de conques, de cristal, de corail, d’argent, d’or, d’émeraudes, de diamants, de rubis, de pierres recueillies dans le Dakchiṇâvarta[1] ; ce fils n’aura ainsi rien fait, n’aura rien rendu à ses père et mère. Mais d’un autre côté, qu’un fils initié, discipliné, introduise, établisse dans la perfection de la foi son père et sa mère qui n’ont pas la foi ; qu’il donne la perfection de la morale à des parents qui ont de mauvaises mœurs, celle de la libérable à des parents avares, celle de la science à des parents ignorants ; ce fils aura ainsi fait du bien à son père et à sa mère ; il leur aura rendu ce qu’il leur devait. Voilà ce qu’a dit Bhagavat. Et moi, je n’ai rendu aucun service à ma mère ; il faut que je réfléchisse pour découvrir en quel lieu elle a repris une nouvelle existence.

Il se livra en conséquence à cette recherche, et il vit qu’elle était née de nouveau dans l’univers Marîtchika. Il fit ensuite cette réflexion : Par qui doit-elle être convertie ? Il reconnut que c’était par Bhagavat, et cette idée lui vint à l’esprit : Nous sommes ici bien loin de cet univers ; pourquoi ne ferais-je pas connaître ce sujet à Bhagavat ? En conséquence il lui parla en ces termes : Bhagavat a dit autrefois : Ils font une chose bien difficile les père et mère qui nourrissent leur enfant. Maintenant ma mère a repris une nouvelle existence dans l’univers Marîtchika, et c’est par Bhagavat qu’elle doit être convertie ; que le Bienheureux, par compassion pour elle, consente donc à la convertir. Bhagavat lui répondit : Par la puissance de qui irons-nous [dans cet univers], ô Mâudgalyâyana ? Par la mienne, répondit ce dernier. Alors Bhagavat et le respectable Mahâ Mâudgalyâyana, plaçant leur pied sur le sommet du Sumêru, se mirent en chemin ; au bout du septième jour ils atteignirent l’univers Marîtchika. Bhadra kanyâ[2] aperçut le respectable Mahâ Mâudgalyâyana ; et du

  1. Ceci est une allusion manifeste aux mines de pierreries et de métaux précieux qui rendent célèbre depuis des siècles la province de Golconde, laquelle a toujours été comprise dans le vaste pays nommé Dekhan, c’est-à-dire « la contrée du midi. »
  2. C’est le nouveau nom de la mère de Mâudgalyâyana.