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DU BOUDDHISME INDIEN.

Bhagavat quitta ensuite cet endroit. Il rencontra bientôt un autre ermitage, où résidaient cinq cents Rĭchis. Cet ermitage était abondant en fleurs, en fruits et en eau. Enivré du bien-être dont ils y jouissaient, ces Rĭchis ne pensaient à quoi que ce fût. Aussi Bhagavat, reconnaissant que le temps de les convertir était arrivé, se dirigea vers l’ermitage ; et quand il fut auprès, il y détruisit par sa puissance surnaturelle les fleurs et les fruits ; il y dessécha l’eau, il y fit noircir le vert et frais gazon, et y renversa les siéges. Aussi les Rĭchis, tenant leur tête entre leurs mains, restaient absorbés dans leurs réflexions. Mais Bhagavat leur dit : Pourquoi, ô grands Rĭchis, restez-vous ainsi absorbés dans vos pensées ? — Bhagavat ! tu n’as pas plutôt mis le pied ici, sur cette terre de pureté, que nous sommes tombés dans l’état où tu nous vois. Pourquoi ? dit Bhagavat. Cet ermitage, répondirent-ils, qui abondait en fleurs, en fruits et en eau, est détruit ; puisse-t-il redevenir tel qu’il était autrefois ! Qu’il redevienne comme auparavant, dit Bhagavat ; et après qu’il eut déployé sa puissance surnaturelle, l’ermitage redevint tel qu’il était autrefois. Aussi les Rĭchis furent-ils frappés d’un étonnement extrême, et ils éprouvèrent pour Bhagavat des sentiments de bienveillance. Bhagavat connaissant l’esprit, les dispositions, le caractère et le naturel de ces cinq cents Rĭchis, leur exposa l’enseignement de la Loi, fait pour donner l’intelligence des quatre vérités sublimes ; de telle sorte que dès qu’ils l’eurent entendu, ils virent face à face la récompense de l’état d’Anâgâmin, et acquirent une puissance surnaturelle. Puis dirigeant leurs mains réunies en signe de respect du côté où se trouvait Bhagavat, ils lui parlèrent en ces termes : Puissions-nous, seigneur, obtenir d’entrer dans la vie religieuse, sous la discipline de la loi qui est bien renommée, et devenir religieux ! Puissions-nous accomplir, en présence de Bhagavat, les devoirs de la vie religieuse ! Bhagavat leur dit alors : Approchez, Religieux ; embrassez la vie religieuse. Bhagavat n’eut pas plutôt prononcé ces paroles, qu’ils se trouvèrent rasés, couverts du manteau religieux, et que, munis du pot aux aumônes et du vase dont l’extrémité est en bec d’oiseau, ayant une barbe et une chevelure de sept jours, ils parurent avec l’extérieur décent de Religieux qui auraient reçu l’investiture depuis cent ans. Approchez, leur dit de nouveau le Tathâgata ; et rasés, couverts du manteau religieux, sentant aussitôt le calme descendre dans tous leurs sens, ils se tinrent debout, puis s’assirent avec la permission du Buddha. Après de longs efforts, après des études et une application profondes, ces Rĭchis [ayant reconnu ce que c’est que la roue de la transmigration], qui porte cinq marques, [qui est à la fois mobile et immobile ; ayant triomphé de toutes les voies de l’existence, en les brisant, en les renversant, en les dissipant, en les détruisant,] devinrent de ceux qui sont dignes de res-