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DU BUDDHISME INDIEN.

le moment convenable pour aller [chercher ce qui me revient]. Celle-ci ayant épié le moment convenable, se rendit auprès de Pûrṇa et reçut bien vite [ce qui lui revenait]. Les autres filles perdaient toujours leur temps à attendre ; elles interrogèrent la première servante, qui leur indiqua comment elle faisait. Elles partirent donc avec elle, et reçurent alors aussi vite que la première ce qui leur revenait. Aussi leurs maîtresses leur demandèrent-elles : D’où vient que vous revenez maintenant si vite ? Les servantes répondirent : Vous devez ce bonheur à votre belle-sœur aînée ; sa servante reçoit ce qui lui revient aussitôt qu’elle arrive ; aussi partons-nous toujours avec elle. Les deux sœurs dirent avec un sentiment de jalousie : C’est ainsi qu’il en arrive à ceux dans la famille desquels le fils d’une esclave exerce à son gré le commandement.

Cependant, quand un certain temps se fut écoulé, Bhavila, Bhavatrâta et Bhavanandin, toujours réunis et vivant en parfaite intelligence, revinrent du grand Océan en ramenant leur vaisseau sain et sauf. Bhavila demanda à sa femme : As-tu été traité honorablement par Pûrṇa ? Elle répondit : Comme par un frère ou par un fils. Les autres femmes, interrogées par leurs maris, leur répondirent : C’est ainsi qu’il en arrive à ceux dans la famille desquels le fils d’une esclave exerce à son gré le commandement. Les deux frères firent cette réflexion : Les femmes sèment la division entre les amis.

Au bout de quelque temps, on exposa dans la boutique des étoffes de Bénarès ; à peine ces étoffes étaient-elles exposées, que le fils de Bhavila vint à y entrer. Pûrṇa donna à cet enfant une couple de pièces de ces étoffes pour qu’il s’en couvrît. Les autres femmes le virent ; elles envoyèrent leurs enfants [à la boutique]. Or, on y avait exposé des étoffes de Bénarès et des étoffes d’un tissu grossier. Le hasard voulut que quand ces enfants arrivèrent, ce fut de ces dernières que Pûrṇa les revêtit. Les deux mères dirent à leurs maris : Voyez ! on donne aux uns des étoffes de Bénarès ; on en donne aux autres d’un tissu grossier. Les deux frères répondirent par cette observation : Comment cela a-t-il pu se faire ? On avait certainement exposé dans la boutique des étoffes de Bénarès et des étoffes d’un tissu grossier[1].

Une autre fois on exposa du sucre dans la boutique. Le fils de Bhavila

    de chefs de marchands et d’autres gens qui vivent de leur commerce, est assis, brillant d’une « splendeur qui égale l’éclat du soleil. C’est quand ceux qui l’entouraient se furent levés et qu’ils furent partis, qu’il nous a donné ce qui nous revenait. » Au reste, la version tibétaine renferme encore d’autres additions qui ne m’ont pas paru avoir assez d’importance pour être introduites dans le récit.

  1. La version tibétaine ajoute : « Ce ne peut être une inadvertance. »