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INTRODUCTION À L’HISTOIRE

bien. — Tu es capable, ô Mâudgalyâyana, de confondre les Tîrthyas par la loi ; mais ce n’est pas toi qui as été provoqué par eux à faire des miracles, c’est moi-même qui l’ai été. C’est moi qui dois, au moyen de ma puissance surnaturelle, opérer des miracles supérieurs à ce que l’homme peut faire, et cela dans l’intérêt des créatures ; c’est moi qui dois confondre les Tîrthyas, satisfaire les Dêvas et les hommes, combler de joie les cœurs et les âmes des gens de bien. Va, Mâudgalyâyana, te rasseoir sur ton siége ! Et Mahâ Mâudgalyâyana alla s’y rasseoir en effet.

« Alors Bhagavat s’adressa au roi du Kôçala, Prasênadjit, et lui dit : Qui demande, ô grand roi, que le Tathâgata opère des miracles supérieurs à ce que l’homme peut faire, et cela dans l’intérêt des créatures ? Aussitôt Prasênadjit, le roi du Kôçala, s’étant levé de son siége, ayant rejeté sur une épaule son vêtement supérieur, et posé à terre son genou droit, dirigea vers Bhagavat ses mains réunies en signe de respect, et lui parla ainsi : C’est moi, seigneur, qui prie Bhagavat d’opérer, au moyen de sa puissance surnaturelle, des miracles supérieurs à ce que l’homme peut faire ; que Bhagavat opère des miracles dans l’intérêt des créatures ; qu’il confonde les Tîrthyas ; qu’il satisfasse les Dêvas et les hommes ; qu’il comble de joie les cœurs et les âmes des gens de bien ! « Alors Bhagavat entra dans une méditation telle, qu’aussitôt que son esprit s’y fut livré, il disparut de la place où il était assis, et que s’élançant dans l’air du côté de l’occident, il y parut dans les quatre attitudes de la décence, c’est-à-dire qu’il marcha, qu’il se tint debout, qu’il s’assit, qu’il se coucha. Il atteignit ensuite la région de la lumière ; et il ne s’y fut pas plus tôt réuni, que des lueurs diverses s’échappèrent de son corps, des lueurs bleues, jaunes, rouges, blan-

    (History, Antiquities, etc., of Eastern India, t. II, p. 45.) Notre Religieux est le sage même que les Chinois nomment Mou kian lian, suivant l’orthographe de M. A. Rémusat. (Foe koue ki, p. 32.) Il passe pour avoir été celui des disciples de Çâkya qui s’était acquis la plus grande force surnaturelle. (Sumâgadhdâ avad., f. 6 a.) Le grand géographe Ritter en a fait un artisan, et l’a nommé « le Dédale de la haute antiquité indienne ; » je ne puis pas croire que ce rapprochement soit sérieux. (Erdkunde, t. V, p. 821.) Klaproth se trompe comme Csoma, quand il avance que la forme sanscrite de ce nom propre est Manggalyam ; mais il a le mérite d’approcher, avec le secours des Chinois, de la véritable signification du nom que portait le Brahmane, auteur de la race dont était issu Mâudgalyâyana. (Foe koue ki, p. 68, note a.) Ce patronymique dérive en effet de Mudgala, où l’on reconnaît mudga, le phaseolus Mungo ; ici encore, dans ce nom populaire, nga remplace le dgâ sanscrit. Le Harivam̃ça cite un Mudgala, fils de Viçvâmitra, qui a pu être le chef de la famille à laquelle appartenait Mâudgalyâyana (Langlois, Harivamsa, t. I, p. 123 et 148) ; et dans la liste des vingt-quatre Gôtras, ou familles brahmaniques, que donne le grand Dictionnaire de Râdhâ kant deb, on trouve le nom de Mâudgalya, c’est-à-dire « le descendant de « Mudgala. » (Çabda kalpa druma, t. I, p. 813 et 814.) Quand les légendes parlent de ce personnage, elles font toujours précéder son nom de l’épithète honorifique de Mahâ, « grand ; » mais quand c’est Çâkyamuni qui lui adresse la parole, il ne fait jamais usage de ce titre. J’ai remarqué la même distinction en ce qui touche le nom de Kâcyapa.