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mine. On y retrouve l‘accent d’un honnête curé de village, qui met une certaine ardeur à éclairer les esprits. Lorsqu’il était Carmélite, il avait sans doute vu de près les gens de la campagne [1].

Laurent le Magnifique montre un talent bien plus vigoureux ; il sait s’identifier avec les paysans qu’il met en scène. Sa Nencia di Barberino [2] se lit comme une suite de véritables chansons populaires des environs de Florence, qu’il a réunies dans ses octaves à l’allure franche et rapide. L’objectivité du poëte est telle qu‘on se demande s’il a de la sympathie pour le personnage qu’il fait parler (c’est un jeune paysan, Vallera, qui déclare son amour à Nencia) ou s’il veut s’en moquer. Il a recherché le contraste avec la bucolique conventionnelle qui met toujours en scène Pan et les nymphes ; Laurent se complaît dans le grossier réalisme de la vie rustique, et pourtant l’ensemble de son oeuvre produit une impression vraiment poétique.

  1. F. Bapt, Jfonituini Bueoliea seu adoUscentia in deeem eelogas divisa; floiiTent réimprimé, p. ex. à Strasbourg en 1504. L’époque où ces églogues ont été composées est indiquée par la date de la préface (1498), par laquelle on voit aussi que la neuvième et la dixième églogue ont été écrites plus tard. En téte de U dernière on lit : Post reltgionis ingressum; en tête de la septième, au contraire, on trouve ces mots : Cum Jam autar ad religionsm aspiraret. Dans CCS églogues il n’est pas exclusivement question de la vie rustique, il n’y en a même que deux qui en parlent, savoir la sixième, De iitceptaiione rusticorum et chivm (dans laquelle le poëte montre sa préférence pour les paysans), et la huitième, De rusticorum roli- gione ; les autres parlent d’amour, des rapports entre les riches et les postes, de la conversion aux sentiments religieux, des mœurs de la curie romaine.
  2. Poesie tU Lorento Magnif.^ i, p. 37. — Les remarquables poésies de l’époque du Uinnegesang allemand, qni portent le nom de Neithard de Reuenthal, ne représentent la vie rustique qu’autant que le chevalier trouve du plaisir à se livrer à cette description. Les paysans, dans leurs chants populaires, relèvent vivement les railleries de Reuenthal. Comp. Charles Schroeder, La poésie cham-