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autres aux portes des églises[1], etc., ne sont pas, à beaucoup près, les seules preuves qu’on puisse citer dans ce genre ; son talent à peindre l’âme par le geste dénote à lui seul une étude profonde et persévérante de la vie.

Les poètes qui viennent après lui l’égalent rarement sons ce rapport ; quant aux nouvellistes, la grande loi du genre littéraire qu’ils cultivent leur défend rigoureusement de s’arrêter aux détails. (Comp. p. 29, 75 et 76.) Ils peuvent être aussi prolixes qu’ils le veulent dans leurs prologues et dans leurs narrations, mais il leur est interdit de faire des tableaux de genre. Il faut prendre patience jusqu’à ce que les hommes élevés à l’école de l’antiquité aient l’envie et l’occasion de se livrer aux longues descriptions.

Ici encore, nous retrouvons l’homme qui se passionne pour tout : Sylvius Ænéas. Ce n’est pas seulement la beauté d’un paysage, ce ne sont pas seulement les objets intéressants au point de vue cosmographique ou archéologique (t. I. p. 222 ; t. II, p. 24), mais ce sont encore toutes les scènes vivantes[2] qu’il aime à décrire. Parmi les nombreux passages de ses mémoires où il retrace des faits qui n’auraient guère alors tenté la plume d’un écrivain, nous ne citerons ici que les régates du lac de Bolsena[3]. Il serait difficile de découvrir quels sont les épistolograpbes ou les narrateurs antiques qui lui ont transmis le goût de ces tableaux si vivants ; en général, du reste, les points de contact qui existent entre

  1. Inferno, XXI, 7. Purgat., XIII, 61.
  2. Il ne faut pas prendre trop au sérieux le fait qu’il avait à sa cour une sorte de merle moqueur, le Florentin Greco, hominem certe cujusvis mores, naturam, linguam cum maximo omnium qui audiebant risu facile experimentem. Platina. Vitæ Pontif., p, 310.
  3. Pii II Comment., VII, p. 391.