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C’est assurément une maigre compensation pour une grande nation, qui était peut-être faite plus que toute autre pour reproduire dans le drame, comme dans un miroir, l‘image de ce qu’elle avait de plus grand et de plus élevé. Mais elle devait être privée de cette gloire pendant des siècles, par suite de faits dont elle n’est pas toujours responsable. Sans doute le talent dramatique inhérent au génie italien devait résister à toutes les influences contraires, et par la musique l’Italie a achevé de rendre l’Europe sa tributaire. Cela peut paraître suffisant à celui qui trouve que ce genre de perfection contre-balance son infériorité dans l’art dramatique.

Ce que le drame n’avait pu faire, peut-on l’attendre de l’épopée ? On reproche précisément à l’épopée italienne d’avoir surtout échoué dans la peinture des caractères.

On ne peut lui contester d’autres avantages, notamment celui d’être vraiment populaire depuis trois siècles et demi, tandis que presque toute la poésie épique des autres peuples n’est devenue qu’une des curiosités de l’histoire littéraire. Cela tient-il peut-être aux lecteurs, qui demandent et qui aiment autre chose que ce qui est goûté dans le Nord ? Du moins il faut que nous nous placions en partie au point de vue italien pour apprécier la valeur exacte de ces poèmes ; il y a même des hommes très-distingués qui déclarent que le mérite de ces ouvrages est pour eux lettre close. Sans doute celui qui analyse Pulci, Bojardo, l’Arioste et Berni sous le

    ieeondoilmo uso. Diar. Ferr., dans MURAT., XXIV, COl. 393. On ne peut croire à une méprise provoquée par les Ménechmes de Plaute, car ceux-ci sont exactement nommés. (I, col. 278.) Comp. plus haut, p. 36, note 2.