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CIIAP. V. — affaiblissement de la foi en général 843 bouche de Sannazar le récit d’uue vision qu’il a eue un matin, alors qu’il était plongé dans un demi-sommeiK II voit un ami mort, Ferraudus Januarius, avec lequel il 8’était souvent entretenu jadis de l’immortalité de l’âme ; il lui demande si les peines de l’enfer sont réellement éternelles et terribles comme on le dit. Après quelques instants de silence, l’ombre répond tout à fait dans le sens d’Achille interrogé par Ulysse ; « Ce que je puis te dire et t’affirmer, c’est que nous autres, qui avons quitté la vie terrestre, nous éprouvons un violent désir d’y rentrer. » Puis elle salue l’ami étonné et disparaît. On ne saurait méconnaître que de pareilles idées sur l’état quisuit la mort supposent ou amènent la suppression des dogmes chrétiens lesplus essentiels. Pour les partager, il fallait avoir perdu presque entièrement la nulion du péché et de la rédemption. Qu’on ne se laisse pas abuser par rinfluence des prédicateurs et des épidémies de pénitence dont nous avons parlé plus haut (p. 234 ss., 261 ss.) ; car, même en accordant que les individus éclairés y aient pris part comme les autres, Il faut se dire que ce phénomène était dû surtout à un besoin d’émotion, à une détente momentanée des esprits, à l’épouvante causée par une calaiiiUc publique, à l’espérance du secours céleste. Le réveil de la conscience n’avait pas pour conscqucnce for cée le sentiment des fautes commises et de la rédemption ; même une pénitence extérieure très-rigoureuse ne suppose pas nécessairement le repentir dans le sens chrétieOé Quand des hommes de la Renaissance, à l’esprit largement développé, nous racontent que leur principe est de ne se repentir de rien cela peut certainement être vrai ^ Cardanus, Dé propna cap. Xlil : Non peenitere ullivs rei quam voluntarie effeccrim, eiiam quœ maie cmisKt ; sans Cela j’aurais été le plus malheureux des hommes.