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contemporains regardaient leurs paroles comme l’expression fidèle de leurs seatimeuts ; il ne nous est donc pas non plus permis de les traiter de pures déclamations. Celui qui voudra prendre la peine de lire daus le Cortigiano le discours dont nous avons parlé, recoonattra combien il serait difficile d’en donner une idée par un extrait. En ce temps-là vivaient en Italie quelques femmes distinguées qui ont dû leur célébrité surtout à des relations de ce genre, telles que Julie de Gouzague, Véronique de Coreggio et, par-dessus toutes, Vittoria Colonna. Le pays des libertins les plus effrénés et des plus grands moqueurs respectait cette espèce d’amour et cette sorte de femmes : c’est ce qu’on peut dire de plus fort eu leur faveur. Y avait-il un graiu de vanité chez Vittoria ? aimait-elle à entendre les hommes les plus illustres de l’Italie lui répéter l’expression raffinée d’un amour sans espoir ? Qui pourrait le dire ? Si parfois cela devint une mode, c’est du moins un fait considérable que Viiloria resta toujours la beauté à la mode, et que même àia fia de sa carrière elle inspirait encore les plus fortes passions. Il fallut bien du temps avant que d’autres pays pussent produire des phénomèues de ce genre L’imaginaliou, qui gouverne ce peuple plus que tout autre, est généralement cause que toute passion devient violente et, suivant les circonstances, criminelle dans les moyens qu’elle emploie. On coonait une certaine violence de la faiblesse qui ne sait pas se dominer ; ici, au contraire, il s’agit d une dégénérescence de la force. Parfois s’y rattache un développement qui atteint des proportions colossales ; le crime prend une consistance particulière, personnelle.

11 ne reste plus que peu de freins. Tout le monde, jusqu’aux gens du peuple, se sent, dans son for Inté-