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1518 MOEUnS ET RELIGION.

d’une de ces offenses contre lesquelles le Code italieD du temps est désarmé, et, en général, d’un de ces affronts contre lesquels il n’y a eu jamais et nulle part de loi suffisante, a le droit de se faire justice elle-méme. Seulement il faut que la vengeance soit ingénieuse et que la satisfaction résulte du dommage effectif causé à l’offenseur et de l’humiliation qu’il subit ; aux yeux de l’opinion publique, la vengeance qui n’est que le triomphe de la force brutale n’équivaut pas à une satisfaction. H faut que l’individu tout entier triomphe, et non pas seulement le droit du plus fort.

L’Italien de celte époque est capable d’une grande dissimulation pour atteindre un but déterminé, mais il est incapable d’hypocrisie en matière de principes. Aussi reconnait-oû avec une parfaite naivcié la vengeance comme on besoin. Des gens tout à fait de sang-froid l’admirent surtout quand la passion n’y est pour rien et qu’on l’exerce simplement « pour se faire respecter par les autres* ». Pourtant ces cas ont dû être très-rares comparativement à ceux où la passion dominait. Ce genre de vengeance se distingue nettement de la vendetle ; tandis que celte dernière n’est qu’une espèce de compen sation, une application du jus talionîs^ la première va lécessairement au delà, attendu que non-seulement elle veut avoir le droit pour elle, mais qu’elle veut encore avoir les admirateurs ou, suivant les circonstances, les rieurs de son côté.

C’est là aussi ce qui explique le long intervalle qui sépare souvent la vengeance de l’outrage. Pour une « heîla vendetta il faut, eo généi’al, un concours particuUsés entre autres par Pulci , Morgante, canto XXI, Str. 88 s»,, 104 ss.

ï Guicciardini, llicordi, 1. c., n®74.