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L’ÉTAT AU POINT DE VUE DU MÉCANISME.

mais une foule de sujets taillables et corvéables à merci, qui, par exemple, n’obtenaient le droit de formariage qu’en vertu d’une permission spéciale, et à qui il était absolument interdit d’aller faire leurs études hors de chez eux, surtout dans la ville guelfe de Bologne. L’Université de Naples, que Frédéric favorisait par tous les moyens possibles, donna le premier exemple en matière de contrainte scolaire, tandis que l’Orient laissait, du moins, la jeunesse libre sous ce rapport. Par contre. Frédéric restait entièrement dans la tradition musulmane, en trafiquant, pour son propre compte, avec tous les ports de la Méditerranée, en se réservant le monopole d’une foule de produits, tels que le sel, les métaux, etc., et en privant ainsi tous ses sujets de la liberté commerciale. Les kalifes fatimites, avec leur doctrine de l’incrédulité, avaient été, du moins au commencement, tolérants à l’égard des croyances de leurs sujets ; Frédéric, au contraire, couronne son système de gouvernement par une inquisition contre les hérétiques qui paraît d’autant plus condamnable si I’on admet qu’il ait persécuté dans les hérétiques les représentants des idées libérales dans les villes. Il choisit, pour composer sa police et pour former le noyau de son armée, les Sarrasins qui avaient quitté la Sicile pour venir se fixer à Lucérie et à Noccra. exécuteurs impitoyables des volontés du maître et indifférents aux foudres de l’Église. Les sujets, qui avaient perdu l’habitude de porter les armes, assistèrent plus tard à la chute de Manfred et à l’usurpation de Charles d’Anjou, sans rien faire pour s’y opposer ; quant au prince français, il hérita de ce mécanisme gouvernemental et s’en servit pour son propre compte.

À côté de l’empereur centralisateur surgit un usurpa-