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LA RÉSURRECTION DE L’ANTIQUITÉ.

par Adrien de Corneto (p. 151). Il y a aussi de brillantes descriptions de chasses par Hercule Strozza, par Adrien, que nous venons de nommer, etc. ; il serait regrettable que le lecteur moderne en voulût à ces poëtes à cause de la flatterie qui a inspiré leurs œuvres. La perfection de la forme et la valeur historique de ces poèmes, valeur souvent considérable, assurent à ces gracieuses compositions une vie plus longue que ne le sera celle de mainte poésie connue de notre temps.

En somme, ces ouvrages sont toujours d’autant meilleurs que l’auteur y vise moins au pathétique et à la généralité. Il y a de petites poésies épiques composées par des maîtres célèbres qui, en abusant de la mythologie, produisent sans le savoir l’impression la plus comique du monde. Tel est le poëme d’Hercule Strozza[1] sur la mort de César Borgia (p. 143, note 2). On entend les plaintes de Rome, qui avait mis tout son espoir dans les papes espagnols, Calixte III et Alexandre VI, et qui, après eux, regardait César comme l’homme providentiel. Le poëte profite de la circonstance pour raconter toute l’histoire du prince jusqu’à la catastrophe de 1503. Puis il demande à la Muse quels avaient été à ce moment[2] les conseils des dieux, et Érato raconte ce qui suit : dans l’Olympe, Pallas prit parti pour les Espagnols, Vénus pour les Italiens ; toutes deux se jetèrent aux genoux de Jupiter, sur quoi le maître des dieux les embrassa, les calma l’une et l’autre, et s’excusa de ne rien faire parce qu’il était impuissant contre le destin filé par

    même style, XII, 130. — combien le poëme d’Angilbert sur la cour de Charlemagne est-il déjà près de cette Renaissance ! Comp. Pertz, Monum. II.

  1. Strozzii Poetæ, p. 31 ss. Cæsaris Borgiæ ducis epicedium.
  2. Pontificem addiderat, flammis luttralibus omnes.
    Corporis ablutum lames, Diis Jupiter ipsis, etc.