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LA RÉSURRECTION DE L’ANTIQUITÉ.

vent le temple de Vénus et de Rome, avec l‘idée que c’est celui de Castor et de Pollux, où le Sénat s’assemblait si souvent, et là il s’absorbe dans des méditations sans fin, songeant aux grands orateurs Crassus, Hortensius et Cicéron. Pie II prend tout à fait le ton sentimental quand il fait la description de Tibur[1], et, peu de temps après lui(X467), Polifilo inaugure Tidéalisalion des ruines[2] : il montre des débris de voûtes et de colonnades immenses, disparaissant à moitié sous une forêt de platanes, de lauriers, de cyprès séculaires et de buissons inextricables. Dans l‘histoire sacrée s’introduit, on ne sait trop comment, l‘usage de faire voir le Christ naissant dans les ruines magnifiques d’un palais d’autrefois[3]. Enfin l‘habitude d’orner de ruines artificielles des jardins somptueux n’est que la manifestation pratique de ce même sentiment.

  1. Pii 11 Commentarii, p. 251, dans le livre V. — Comp. aussi l’élégie de Sannazar : Ad minas Cumarum. urlis vetustissima [Optra, fol. 236 ss.).
  2. Polifilo (c'est-à-dire Franciscus Coîumna), Hypncrotomachia, xû>i hvmana otnnia non nisi somnum esse docet atque obiter plurima scüa sane quam digna commémorât. Venise, Aide Manuce, 1499. Comp. sur ce livre si remarquable entre autres Didot, Aide Manuce, Paris, 1875, p. 132-142 et GnuYER, Baphaeîei VanUquîiè, I, p. 191 ss. J. Borckhardt, Histoire de la Renaissance en Italie, p. 43 SS., et le livre d'A. Ilg, Vienne, 1872.
  3. Tandis que tous les Pères de l’Église et tous les pèlerins ne connaissent qu’une grotte. Les poètes aussi peuvent se passer du palais. Comp Sannazaro, De partu Virginis, I, II, v, 284 ss.