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DÉVELOPPEMENT DE L’INDIVIDU.

devons insister sur ce point, qui est un des principaux de ce livre, que ce n’est pas l’antiquité seule, mais son alliance intime avec le génie italien qui a régénéré le monde d’Occident. L’indépendance que l’esprit moderne a tardée en italie, tout en étant tributaire de l’antiquité, l’on ne considère, par exemple, que la littérature néo-latine ; mais dans l’art plastique et dans plusieurs autres sphères de l’activité humaine elle est extrêmement ramarquable, et la fusion de deux époques de la vie intellectuelle d’un même peuple, époques séparées par de longs siècles apparaît comme le produit d’un travail parfaitement indépendant et, par suite, légitime et au reste de l’Occident à se mettre en garde contre la grande impulsion qu’il recevait de l’Italie. ou bien à se laisser entraîner tout à fait ou en partie par le mouvement ; dans le dernier cas. il fallait ne pas gémir sur la ruine prématurée du moyen âge, de ses travaux, de ses théories. Si les idées enfantées par le moyen âge avaient pu se défendre, elles vivraient encore ; si les rêveurs qui aspirent au retour de cet âge bienheureux étaient obligés d’y vivre seulement une heure, ils demanderaient à grands cris l’air du monde moderne. Il est certain que dans une grande révolution comme celle-là, plus d’une belle et noble fleur périt sans être assurée de revivre pour toujours dans la tradition et dans la poésie ; mais ce n’est pas une raison pour maudire la révolution elle-même. Cette révolution consiste en ce que, à côté de l’Église qui jusqu’alors avait fait l’unité de l’Occident (privilège qu’elle allait perdre bientôt) se forme un nouveau milieu intellectuel qui deviendra peu à peu comme l’atmosphère où vivront tous les esprits cultivés de l’Europe. Le plus grave reproche qu’on