Page:Burckhardt - La civilisation en Italie au temps de la Renaissance. Tome 1.djvu/214

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
210
DÉVELOPPEMENT DE L’INDIVIDU.

contre les hommes, et jamais contre Dieu. Ses croyances sont chose tout à fait insignifiante, étant donnée la manière dont il a vécu ; il en est de même de ses ouvrages d’édification, qu’il n’a faits que dans des vues d’intérêt personnel[1]. Je ne vois pas, du reste, ce qui aurait pu l’entraîner à blasphémer. Il n’était ni docteur ni théoricien ; il ne pouvait pas extorquer de l’argent à Dieu en employant la menace et la flatterie ; n’ayant pas de refus à encourir, il n’avait pas lieu de proférer des blasphèmes. Un homme comme lui ne fait rien pour rien.

Ce qui témoigne en faveur de l’esprit italien actuel, c’est qu’un tel caractère et une telle manière de procéder sont devenus absolument impossibles. Mais, au point de vue historique, Arétin restera toujours une figure considérable.

  1. Il a peut-être composé ces écrits en vue d’obtenir le chapeau rouge ou parce qu’il avait peur des rigueurs de l’inquisition qu’il avait encore osé censurer vigoureusement en 1535 (voir fol. 37), mais qui, depuis la réorganisation de cette institution (1542), augmentèrent tout à coup et réduisirent toutes les voix au silence.