Page:Burckhardt - La civilisation en Italie au temps de la Renaissance. Tome 1.djvu/207

Cette page n’a pas encore été corrigée
203
CHAPITRE IV. — LA RAILLERIE ET L’ESPRIT MODERNES.

comme idola antiquorum ; il avait fermé l’entrée du Belvédère, laissé inachevés les travaux de Raphaël, banni de la cour les acteurs et les poetes ; on craignait qu’il ne fit convertir en chaux toutes les statues destinées à orner l‘église de Saint-Pierre. Dès les premiers jours, il se brouilla avec la plume redoutable d’un certain Francesco Berni, en menaçant de faire jeter dans le Tibre, non pas la statue de Paquin [1], mais les pamphlétaires eux-mémes. La réponse à cette menace fut le célèbre opuscule « contre le pape Adrien «, libelle dicté non par la haine, mais par le mépris qu’inspirait ce barbare ridicule, croisé de Hollandais et d’Allemand [2] ; l’auteur réserve sa violence pour les cardinaux qui l’ont élu. On lui impute la peste qui désolait Rome en ce temps-là [3] ; Berni et d’autres [4] dépeignent aussi l’entourage du Pape, les Allemands qui le dominent [5], avec la liberté piquante du feuilleton moderne qui travestit et qui grossit tout. La biographie que Paul Jove écrivit sous les auspices du cardinal de Tortosa, et qui, dans le fait, devait être un panégyrique, est, pour tous ceux qui savent lire entre les lignes, un modèle de raillerie. Rien de comique (surtout pour l‘Italie de ce temps-là) comme le passage où Adrien fait des démarches auprès du chapitre de Sara-

  1. Toute la prétendue délibération qui a pour objet la suppression de la statue de Pasquin, dans Paul. Jov,, Vita Hadriani, est transférée de Sixte IV à Adrien. — Comp. Lettere de principi, I, 114 ss. Lettre de Negro du 7 avril 1523. Pasquin avait, le jour de Saint-Marc, sa féte particulière ; le Pape défendit de la célébrer.
  2. Dans les passages rappr »chés par Gregorovius, VIII, p. 330, note, 381 ss., 393 ss.
  3. Compar. Pier. Valer., De infel. Ut., ed. Mencken, p. 178 : Pestilentia quœ cum âdriano VI invecta liomam invasit. Compar ibid., p 285.
  4. P. ex. : Firenzuola, Opere (Milano, 1802), vol. I, p. 116, dans les Discorsi degli animaU.
  5. Compar. les noms dans Hoefler, Comptes rendus des séances de l’académie ds Vienne (1876), t. LXXXII, p. 435.