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CHAPITRE III
LA GLOIRE MODERNE

Au déveîoppemenl de l’individu correspond aussi un nouveau genre de signe extérieur : la gloire moderne[1].

En dehors de ritalie, les différentes classes de la société vivaient chacune à part, avec les avantages héréditaires qu’elles avaient conquis au moyen âge. La gloire politique des troubadours et des minnesængers, par exemple, n’existe que pour les chevaliers. En Italie, au contraire, toutes les classes sont égales devant la tyrannie ou devant la démocratie ; on y voit déjà poindre une société homogène qui a son point d’appui dans la littérature italienne et latine ; il fallait ce terrain pour faire germer l’élément nouveau qui allait entrer dans ïa vie. Ajoutez à cela que les auteurs latins, que l’on commençait à étudier sérieusement, surtout Cicéron, le plus lu et le plus admiré de tous, sont pleins de l’idée de la gloire, et que l’image de la reine du monde, qui revient sans cesse dans leurs écrits, s’impose à l’Italie comme

  1. Nous ne citerons que : Blondus, Roma triomphans, 1, V, p. 117 ss., où les définitions de ¡a gloire sont puisées dans les anciens et où le désir de la gloire est une passion formellement permise, même au chrétien. L’écrit de Cicéron, De gloria, que Pétrarque croyait posséder, lui a été dérobé par son maître Convencvole, et n’a plus reparu depuis. — Alberti, nommé ci-dessus, a célébré l’amour de la gloire dans une œuvre de jeunesse qu’il a composée lorsqu’il avait à peine vingt ans : Opere, vol. I, p. 127-166.