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L’ÉTAT AU POINT DE VUE DU MÉCANISME.

demandaient à grands cris des réformes. Dans l’intervalle avait paru Luther.

Sous Adrien VI (1522-1523), il y eut bien quelques réformes timides ; mais, en face du grand mouvement qui se produisait en Allemagne, elles étaient insuffisantes. Adrien ne pouvait guère faire autre chose que tonner contre la corruption du jour, contre la simonie, le népotisme, Tincurie chez les fonctionnaires, le cumul, le gaspillage, le banditisme et l’immoralité ; la mort l’empêcha de rendre des édits sévères. Le luthéranisme lui-même ne semblait pas le danger le plus redoutable ; un observateur de Venise, célèbre par son esprit, Girolamo Negro, pressent pour Rome des malheurs prochains et terribles[1].

Sous Clément VII, l’horizon de la ville éternelle s’obscurcit ; des vapeurs sinistres s’élèvent, pareilles à ce voile livide dont le sirocco couvre parfois le pays et qui rendent souvent l’arrière-saison si funeste à la campagne romaine. Le Pape est détesté partout ; pendant que les esprits sérieux continuent d’étre inquiets[2], des ermites


    que sous Léon X le mal ne triomphe positivement du bien, et in te bellum a nostrœ religionis hostibus ante audias geri quam parari.

  1. Lettere de principe, I, Rome, 17 mars 1523. « Pour bien des raisons l’existence de cet État ne tient plus qu’à un fil ; Dieu veuille que nous ne soyons pas bientôt obligés de fuir à Avignon ou jusqu’aux confins de l’Océan. Je vois que la chute de cette monarchie spirituelle est imminente… Si Dieu ne vient à notre secours c’en est fait de nous. » Adrien a-t-il été empoisonné ou non ? c’est ce qu’il n’est pas possible de conclure positivement de l’ouvrage de Blas Ortiz, Itinerar. Hadriani (Baluz. Miscell, ed. Mansi, I, p. 286 ss.) ; l’opinion publique le croyait. Les différentes versions qui ont couru sur la mort d’Adrien ont été réunies par H. Bauer, Adrien VI, portrait de l’époque de la Réforme. Heidelberg, 1876, p. 150 ss.
  2. Negro, sur le 24 oct. (ou plutôt sept.), le 9 nov. 1526, le 11 avril 1527. Sans doute il avait aussi ses flatteurs et ses admirateurs. Le dialogue de Petrus Alcyonus, De exilio, le glorifie peu de temps avant son avènement au pontificat.