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CHAPITRE X. — LA PAPAUTÉ ET SES DANGERS.

extérieure de la papauté : deux cardinaux, qui sont des princes appartenant à des maisons régnantes, vendent leur appui de la manière la plus scandaleuse en se faisant donner de l’argent et des dignités ; ce sont Jean d’Aragon, fils du roi Ferrante, et Ascanio Sforza, frère du More [1]. C’est ainsi que les princes de Naples el de Milan, du moins, étaient intéressés au maintien de la papauté par la part qu’on leur donnait à la curée. Lors de la réunion du conclave suivant (1492), lorsque tous les cardinaux se vendirent, à l’exception de cinq, Ascanio se fit donner pour la seconde fois des sommes énormes, et se réserva, en outre, l’espérance [2] de devenir pape lui-méme à la prochaine élection.

Laurent le Magnifique désirait aussi que la maison de Médicis eût sa part du butin. Il maria sa fille Madeleine avec Franceschetto Cybo, fils du nouveau pape, du premier pontife qui reconnut publiquement ses enfants, et, à partir de ce moment, il demanda non-seulement toute sorte de faveurs pour son propre fils, le cardinal Giovanni (le futur Léon X), mais encore l’élévation de son gendre aux plus hautes dignités [3]. Sous ce rapport, il voulait l’impossible. Chez Innocent VIII, il ne pouvait être question de ce népotisme qui fondait des États, parce que Franceschetto était un homme sans aucune valeur, qui, de même que son père le Pape, ne songeait

  1. Fabroni, LaurenuuiAfagn., adnot. 130, p. 256 ss. Un espion, Vespucci, dit de ces deux personnages ; Hanno inogni eîesione a mcttere a sacco quesîa corîe, e sono i maggior ribddi dd mondo.
  2. Corio, fol. 450. On retrouve dans Grecorovius, VII, 310ss., dés détails sur ces faits de corruption, détails qui sont puisés en partie dans des manuscrits.
  3. On retrouve une lettre de Laurent, qui est très-curieuse sous ce rapport, dans Fabroni, Laurentius Magn., adnot, 217, II, p. 390-on en voit un extrait dans Eanke, ht Papes, I, p, 45, et dans Red-MONT, Laurent de Médicis, II, p. 482 SS.