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chent pas où ils vont. Pardonnez-le-moi, et pensez à la question qui nous occupe.

Grand-Espoir. Mais, mon frère, il faut que ces trois voleurs fussent des poltrons, sans quoi ils n’auraient pas pris la fuite, au moindre bruit qu’ils ont entendu. Pourquoi Petite-Foi n’a-t-il pas montré plus de courage ? Il me semble qu’il aurait dû leur résister de toutes ses forces, et ne leur céder qu’à la dernière extrémité.

Chrétien. Plusieurs les ont traités de poltrons, qui ne les ont pas trouvés tels quand ils en sont venus aux prises avec eux. Et quant à ce que vous dites que Petite-Foi aurait dû montrer du courage, comment l’aurait-il pu, puisqu’il n’en avait point ? Pour vous, mon frère, vous pensez que si vous aviez été à la place de cet homme, vous n’auriez cédé qu’après avoir combattu. Cependant quelque grand que soit votre courage, maintenant que ces voleurs sont loin de nous, je crois bien que s’ils revenaient, et vous attaquaient tout d’un coup, comme ils ont attaqué Petite-Foi, ils vous feraient changer de ton. D’ailleurs, bien que ces gens ne soient que des voleurs, ils sont au service du Roi de l’abîme, dont la voix est comme le rugissement d’un jeune lion[1], et qui, au besoin, vient en personne à leur aide. Moi-même j’ai eu affaire à eux, comme Petite-Foi, et je vous assure que je ne me suis pas facilement tiré de leurs

  1. Prov. XX, 2.