Page:Bunyan - Le pelerinage du chretien a la cite celeste.djvu/112

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Fidèle. Le connaissez-vous ?

Chrétien. Si je le connais ! oui, vraiment ; et bien mieux qu’il ne se connaît lui-même.

Fidèle. Quelle espèce d’homme est-ce, je vous prie ?

Chrétien. Il se nomme Beau-Parleur, et il est né dans notre ville ; je suis surpris que vous ne le connaissiez pas : il est vrai que la ville est grande.

Fidèle. De qui est-il fils, et dans quelle partie de la ville demeure-t-il ?

Chrétien. Son père s’appelle Beau-Diseur, et demeure dans la rue du Babil. Quant à lui, il est connu partout sous le nom de Beau-Parleur ; il a la langue bien pendue ; mais c’est un triste personnage.

Fidèle. Il paraît cependant fort honnête homme.

Chrétien. Oui, quand on ne le connaît que superficiellement, et qu’on ne le voit que de loin ; mais on change d’opinion sur son compte, lorsqu’on fait plus ample connaissance avec lui ; il ressemble à ces tableaux qui font un bel effet à une certaine distance, mais qui sont fort laids quand on les examine de près.

Fidèle. Je ne puis m’empêcher de croire que vous badinez ; car je vous ai vu sourire.

Chrétien. Il est vrai que j’ai souri ; mais Dieu me garde de badiner sur un sujet aussi grave, ou d’accuser faussement qui que ce soit. Mais, pour vous le faire connaître plus à fond, je vous dirai que cet homme s’accommode de toutes les compagnies et de