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CHAPITRE XXXII.

Richard Avenel était dans un état d’excessive surexcitation. Il se proposait de donner à la société de Screwstown une fête tout à fait nouvelle. Mistress M’Catchley avait décrit avec beaucoup d’éloquence les déjeuners dansants de ses amis fashionables de Wimbledon et de Fulham. Elle affirmait que rien n’était plus agréable. Elle avait même dit à bout portant à M. Avenel : « Pourquoi ne donneriez-vous pas un déjeuner dansant ? » Et voilà comment M. Avenel avait résolu de donner un déjeuner dansant.

Le jour étant fixé, Richard s’occupa des préparatifs nécessaires avec l’énergie d’un homme et l’attentive prévoyance d’une femme.

Un matin qu’il se tenait rêveur sur la pelouse, se demandant avec indécision quel serait le meilleur endroit pour établir les tentes, Léonard vint à lui, tenant à la main une lettre ouverte.

« Mon cher oncle, dit-il, doucement.

— Ah ! s’écria M. Avenel comme se réveillant en sursaut. Ah ! eh bien ! qu’y a-t-il ?

— Je viens de recevoir une lettre de M. Dale. Il m’écrit que ma pauvre mère est très-inquiète et très-tourmentée parce qu’il ne peut lui dire qu’il a reçu de mes nouvelles ; sa lettre demande une réponse. Il me semble que j’aurais l’air d’être ingrat envers lui et envers tout je monde… si je n’écrivais pas. »

Richard Avenel fronça le sourcil. Il articula une exclamation d’impatience et s’en alla. Puis revenant sur ses pas, il fixa son œil de faucon sur la candide figure de Léonard, passa son bras sous celui de son neveu et l’entraîna au milieu des arbres.

« Eh bien ! Léonard, dit-il, après un moment de réflexion, le moment est venu pour moi de vous donner une idée des plans que j’ai formés à votre égard. Vous connaissez ma manière de vivre. Elle diffère un peu de ce que vous aviez vu jusque-là, à ce que je présume. Je vous ai donné ce que personne ne m’a donné à moi, un coup d’épaule pour vous aider à faire votre chemin dans le monde. Il faut maintenant vous aider vous-même dans la place que je vous ai assignée.

— C’est mon devoir et mon désir, répondit Léonard avec franchise.

— Bon. Vous êtes un garçon intelligent, comme il faut : vous me ferez honneur. Je me suis demandé quel est le meilleur parti à prendre à votre sujet. Un moment j’ai songé à vous envoyer à l’Université. C’est, je le sais, le désir de M. Dale : peut-être est-ce aussi le vôtre. Mais j’ai abandonné cette idée. J’ai quelque chose de mieux à