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CHAPITRE VI

L’esprit de l’homme est plus pénétrant que conséquent, et il embrasse plus qu’il ne peut lier.
(Vauvenargues.)

Dès ce jour Maltravers devint le commensal habituel de la famille Merton ; il n’avait pas besoin de chercher des prétextes pour excuser cette familiarité. M. Merton, charmé de voir que ses avances n’étaient pas repoussées, lui imposa en quelque sorte son intimité.

Un jour on passa l’après-midi à Burleigh ; Éveline et Caroline complétèrent leur examen de la maison, la tapisserie, les armes, les tableaux, tout fut passée en revue.

Puis elles visitèrent les chevaux arabes. Caroline dit, en passant, qu’elle aimait beaucoup à monter à cheval, et tomba en extase devant un des animaux : celui qui avait la queue la plus longue, cela va sans dire. Le lendemain ce cheval était dans les écuries du presbytère, et un billet d’excuses, galamment tourné, accompagnait ce riche présent.

M. Merton voulait refuser, mais Caroline finissait toujours par obtenir ce qu’elle voulait ; de sorte que le cheval resta dans l’écurie (saisi sans doute, d’étonnement et de dédain) en compagnie du poney du recteur, et des chevaux bruns qu’on attelait à la voiture. Ce don amena, comme conséquence naturelle, des parties à cheval ; il était cruel de séparer complètement l’Arabe de ses camarades. Puis, Éveline ?… comment la laisser toute seule à la maison ? Éveline qui n’avait jamais rien monté de plus fougueux qu’un vieux poney ? Il y avait à vendre, près de là, un charmant petit cheval, appartenant à une dame d’un certain âge, devenue trop forte pour le monter. Maltravers fit cette trouvaille, et en parla à M. Merton ; il avait trop de délicatesse pour afficher de la munificence vis-à-vis de la riche héritière. On acheta le cheval. Il n’y en avait pas de plus tranquille ; Éveline n’avait pas peur du tout. On fit deux ou trois excursions. Quelquefois les jeunes personnes n’étaient ac-