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trant une porte qui communiquait avec un de ces grands cabinets, soi-disant de toilette, espèces d’armoires qu’on rencontre fréquemment dans les chambres à coucher en France, et où l’on serre le bois et d’autres objets divers.

— Non, dit lord Vargrave avec pétulance ; c’est étonnant comme les domestiques aiment à nous priver d’air ! jamais je n’aurais une fenêtre ouverte, si je ne prenais soin de l’ouvrir moi-même. Laissez la porte comme elle est, et appelez-moi demain à neuf heures : pas plus tard. »

Le domestique qui couchait dans une espèce de cabinet noir contigu à l’antichambre, obéit. Vargrave éteignit sa lumière, et se mit au lit. Après avoir, pendant quelques minutes, considéré d’un regard appesanti les tisons mourants, qui jetaient une faible et incertaine clarté dans la chambre, il s’endormit profondément. La pendule sonna une heure du matin, et toute la maison sembla plongée dans le silence.

Le lendemain matin Maltravers fut éveillé par Montaigne, qui, étant revenu de très-bonne heure de la campagne (c’était assez son habitude), avait trouvé chez lui le billet qu’Ernest lui avait écrit la veille au soir.

Maltravers se leva et s’habilla. Tandis que Montaigne écoutait encore le récit que lui faisait son ami de son aventure avec Cesarini, et de l’accusation que ce malheureux avait lancée contre son ancien complice, le domestique d’Ernest entra précipitamment dans sa chambre.

« Monsieur, dit-il, pardon, j’ai pensé que vous seriez bien aise de savoir,… que faut-il faire ?… Tout l’hôtel est sens dessus dessous…… On a envoyé chercher M. Howard, ainsi que lord Doltimore… c’est si étrange, si imprévu !

— Qu’y a-t-il donc ? expliquez-vous.

— Lord Vargrave, monsieur… ce pauvre lord Vargrave…

— Lord Vargrave !

— Oui, monsieur ; le maître de l’hôtel, sachant que vous connaissiez lord Vargrave, vous serait bien obligé si vous vouliez descendre. Lord Vargrave, monsieur, est mort : on l’a trouvé mort dans son lit ! »

Maltravers demeura immobile d’étonnement et d’horreur. Mort ! Et la veille au soir encore il était si plein de vie, de projets, d’espérances et d’ambition !

Aussitôt qu’il se fut remis de sa consternation, Ma]travers se hâta de se rendre chez lord Vragrave, et Montaigne le suivit. Ce dernier, en descendant l’escalier, posa la main sur le bras d’Ernest, et le retint.