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nir. Grâce à l’heureuse souplesse de son caractère, et à une étourderie presque voisine de la légèreté, qui, à vrai dire, lui était naturelle, elle ne songeait pas souvent à l’engagement solennel qu’elle devait bientôt ratifier ou annuler. Mais lorsque le souvenir lui en revenait, il la rendait triste pendant de longues heures, et la laissait distraite et découragée. Sa visite chez mistress Merton fut donc définitivement arrêtée ; le jour du départ était même fixé, quand arriva, un matin, la lettre suivante de lord Vargrave :

À lady Valgrave, etc., etc.
« Ma chère amie,

« Il se trouve que nous avons une semaine de vacances dans notre fainéante de Chambre, et il fait un temps si délicieux que je brûle d’en jouir en compagnie des personnes que j’aime le mieux. Vous me verrez donc presque aussitôt après la réception de cette lettre ; c’est-à-dire que le jour même je dînerai avec vous. Que puis-je dire à Éveline ? Voulez-vous, chère lady Vargrave, lui faire accepter mes hommages qu’elle paraît presque disposée à repousser lorsque je les lui offre moi-même ?

« Je suis, à la hâte, mais très-affectueusement
« Votre tout dévoué,
« Vargrave. »

Hamilton Place, 30 avril 18**.

Cette lettre ne fit plaisir ni à mistress Leslie, ni à Éveline. La première craignait que lord Vargrave ne désapprouvât un voyage dont on ne pourrait guère lui avouer le motif réel. Quant à Éveline, ce contre-temps lui rappelait tout ce qu’elle pouvait oublier. Mais lady Vargrave se réjouissait à la pensée de l’arrivée de Lumley. Jusque-là son caractère doux et passif lui avait fait considérer le mariage d’Éveline et de lord Vargrave comme une affaire arrangée. Le désir et la volonté de son mari exerçaient une puissante influence sur son esprit. Tant qu’Éveline n’était encore qu’une enfant, les visites de Lumley avaient toujours été accueillies avec joie ; la rieuse jeune fille aimait ce lord plein d’enjouement et de bonne humeur, qui lui apportait toutes sortes de pré-