Page:Bulteau - Un voyage.pdf/92

Cette page a été validée par deux contributeurs.
77
cologne

des malades et des voyageurs ; mais on ne peut, en les regardant, se tenir de croire qu’ils ont aussi la mission toute spirituelle de « remettre à sa place » l’étranger outrecuidant.

Quelles plaisantes petites vierges on trouve au musée de Cologne ! Quels excellents saints, laids, émus, appliqués à faire correctement leur personnage ! Et n’est-ce pas touchant que les peintres de cette école aient pris ou reçu les titres de : « Maître de la mort de Marie » — « Maître de la vie de Marie » et d’autres analogues qui suppriment leurs noms, abolissent pour ainsi dire tout le vain détail de leur vie, tout le médiocre de leur être, et les absorbent dans leur spécialité. « Le Maître de la mort de Marie » ! ces quelques mots enferment et parfument comme un sachet la mémoire du bon artisan modeste. Cher vieux peintre, lorsque interrompant sa monotone et délicate fabrication, il peignait un portrait ou, pour complaire au client, quelque autre scène que sa scène, j’espère qu’alors il avait mauvaise conscience !

De telles gens devaient être heureux d’une sorte de bonheur difficile pour nous à imaginer. Ils apprenaient avec soin leur métier, puis toute la vie ils recommençaient de faire les choses qu’ils savaient, ne cherchant pas plus loin. Quand le voisin qui posait la figure de saint Jean était bien ressemblant, que le livre, les plis des rideaux, pour la vingtième