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bologne

cet Allemand ne comprenait rien à l’Italie. J’abandonne vite le manteau et la mémoire impériale.

Mais je suis intéressée par des fragments de tombeaux élevés jadis dans quelque église à des professeurs de l’Université. On y voit des jeunes gens assis à leurs tables, attentifs, écoutant la leçon. Ils sont réels, comme des portraits soigneusement faits d’après nature. Les charmantes figurines racontent le respect des élèves pour le maître, l’amour orgueilleux et humble pour la science, et la belle intimité établie entre ceux qui enseignaient, et les disciples. L’existence spirituelle de ces temps où l’on découvrait la pensée antique, où de toutes parts on perçait des routes vers la connaissance, est inscrite, sur ces plaques de marbre, avec une force qui émeut.

Non loin de là, dressés contre le mur sont des bustes, un entre autres, de Jules III : masque de vieux noceur stupide, bas, vulgaire, le plus injurieux, et sans doute le plus ressemblant des portraits. Jules III, c’est ce pape singulier qui fit un cardinal de son valet de chambre, pour le récompenser d’avoir eu soin du singe que lui, Jules III, aimait comme un fils. Il commit bien d’autres actions, plus vilaines encore : on s’en doute, à regarder sa molle et laide figure. Seulement, il nous a laissé à Rome cette villa proche de la porte du Peuple, et alors on lui pardonne un peu. On ne parvient pas à détester sincèrement la mémoire des pires hommes quand, à leurs vices, ils ont joint le goût et le sens