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un voyage

Dans le musée Civico, il y a un curieux marbre grec, une tête de Pallas, je crois. La déesse hellénique ressemble extraordinairement à l’une de ces belles Anglaises dont, encore qu’on leur trouve « le type grec », on sait, au premier regard, qu’elles sont anglaises et que leurs ascendants furent tous anglais. La dame de marbre a dans les modelés, et l’expression aussi, je ne sais quoi de contemporain qui étonne. J’aimerais apprendre d’où elle vient, mais son cartouche ne le dit pas, et le gardien ne possède aucune lumière sur ce sujet. Cependant il me révèle avec fierté que Gabriele d’Annunzio a beaucoup écrit sur ce buste. Est-ce vrai ? Alors c’est beau que ce gardien le sache ; et plus beau encore qu’il l’invente, si ce n’est pas vrai ? En Italie, la gloire des artistes ne demeure pas enfermée dans les cénacles, les salons, les académies, elle circule par les rues. Je songe avec un peu de jalousie qu’Anatole France pourrait écrire des volumes sur les antiques du Louvre, sans que les somnolents gardiens en avertissent les visiteurs.

Après avoir regardé des poteries, des verreries, des pierres, j’arrive dans la salle où est le manteau de Charles-Quint — le manteau de son sacre, et qu’il donna généreusement à Bologne pour qu’elle gardât mieux le souvenir d’une si glorieuse cérémonie. J’espère que c’est bien en vérité le manteau de Charles-Quint, mais cette auguste relique me laisse froide. Ici je ne me sens de goût que pour les gens qui ont aimé l’Italie, et je suis sûre que