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en hollande


aperçoit quel rôle joue dans l’œuvre de tant de peintres admirables, ce bleu qu’ils ont si singulièrement aimé.

Ce sont les bleus de Franz Hals, décomposés par la lumière, brisés de reflets, — pareils à ces places émues de la nacre, où le bleu jette un éclair vif puis aussitôt devient vert. — C’est elle l’impérieuse couleur qui communique une telle fierté à certaines peintures de l’immense artiste. Voyez l’homme jaune cambré, railleur, au musée de Harlem : si on cache un moment le bleu provocant de son écharpe, tout l’orgueil du tableau s’évapore. Les toiles où Hals a mis ses rouges les plus énergiques, n’ont pas ce caractère dominateur, ni cet accent de joie, — la joie qui donne envie de se battre. Et quand il oppose à la couleur miraculeuse l’orange même, si expansif, c’est elle encore qui régit tout. Elle commande l’harmonie générale jusque sur cette plume de chapeau, à demi trempée d’ombre, et dont les brins prennent un peu de lumière à leur extrémité, et apportent aux nerfs le même frémissement qu’un trait de violon montant vertigineux.

Ailleurs, chez de bien moindres artistes, le bleu garde, à travers toutes les différences d’exécution et de vision, le même caractère significatif, particulier, reconnaissable. Derrière le cygne d’Asselyn, si beau de colère héroïque et qui symbolise Jean de Witt défendant la Hollande, il apparaît dans un ciel couleur de glacier. Et tout le courage qu’exprime le tableau est dans ce coin de ciel froid. C’est le bleu encore qui se charge d’animer la Femme au