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un voyage

tandis que les enfants avides courent le monde pour « gagner ». Et cette autre Nuremberg qui forge, fabrique, s’évertue, s’enrichit, garde à la belle aïeule sa tendresse et sa vénération. Quelque chose, aux profondeurs, les tient unies… Douce ville où ce qui est n’insulte pas ce qui fut, où l’activité, les ambitions pratiques côtoient sans offense le rêve et la beauté.

La richesse y est partout sensible, mais non point cette richesse oisive, élégante, qui, après avoir charmé les yeux, laisse le cœur inquiet. Évidemment, il y a dans Nuremberg nombre de personnes qui n’ont point elles-mêmes amassé leur grande fortune en travaillant de toute leur énergie. Et aussi il y a des pauvres. Mais la ville n’offre pas comme les autres villes opulentes, ce rapprochement sinistre et continuel, du luxe obtenu sans effort, étalé, excessif, trop visible, et de l’extrême misère. Petitement ou largement, tout le monde paraît « à son aise », et tout le monde semble avoir fait quelque chose pour mériter ce bien-être. Peut-être les sages vieilles maisons suffisent-elles à créer une telle apparence, illusoire sans doute ?… — Ailleurs on ne nous offre guère des illusions de cette sorte.

J’aime particulièrement les églises de Nuremberg, leur atmosphère un peu lourde et leurs bibelots pittoresques et les belles armoiries peintes et