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moritzbourg

argent, que faire ? La maison maternelle lui est ouverte. Elle y va. Sa mère et sa tante continuent de mener grand train. Elles reçoivent des gens de lettres, de nobles seigneurs, donnent la comédie. La comtesse de Horn vit là fort plaisamment. Sa mère l’adore et aussi sa tante qu’on appelait « la belle et la bête », tant elle était jolie et stupide. Il y a encore dans la maison, M. d’Épinay : il s’est jadis ruiné pour la mère de Marie-Aurore, et, ensuite, la bonne courtisane l’a recueilli, hébergé. Puis, il y a Dupin de Francueil, ancien amant de Mme d’Épinay. Un jour, Dupin de Francueil est venu chez les demoiselles de Verrières pour sermonner M. d’Épinay, et le ramener à sa femme. Francueil n’a point ramené d’Épinay, au contraire, tombant amoureux de « la belle et la bête », il est resté, lui aussi, dans la cordiale demeure. Étrange famille pour la protégée de la dauphine, la chaste jeune fille soigneusement élevée. Elle s’en accommode, et dans ce milieu d’une si candide immoralité, reste pure et intacte d’esprit.

En se mêlant au sang de la courtisane née dans le peuple, le sang des Kœnigsmark s’apaise comme une brusque rivière à la traversée d’un étang. Marie-Aurore est une fine personne au corps paresseux, à l’esprit délicat, qui aime les lectures graves, les belles conversations, les jolies manières, et la tranquillité. Point de courses à travers le monde : un tour de jardin la fatigue. Point d’aventures. Sa mère morte, seule de nouveau et sans ressources, elle accepte d’épouser Dupin de Francueil. Il a