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moritzbourg

raux ! » C’est qu’il n’avait pas l’âme d’un aristocrate, mais une âme où, mêlés bizarrement, l’instinct anarchique des Kœnigsmark et l’instinct royal avaient produit autre chose qu’eux-mêmes, bien autre chose : le sens humain.

Il commence au maillot la vie errante qui sera sa vie. On le porte à Hambourg, à Berlin, à Varsovie. À sept ans, on le trouve à Breslau ; à huit, en Hollande. C’est là que ses précepteurs, ne parvenant pas à lui apprendre à lire, supposent qu’il a le crâne mal fermé, et songent à lui mettre un cercle de fer autour du front pour le rendre capable de saisir les rudiments de la science. On ne lui met pas le cercle et il apprend à lire tout seul, comme il apprendra le reste. À treize ans, il commence sa carrière militaire. Près du monument élevé sur la place où tomba Gustave-Adolphe, le comte de Schulembourg lui fait une belle petite harangue où il dit entre autres choses : « Soyez irréprochable dans vos mœurs et vous dominerez les hommes. » Maurice, encore qu’il estimât beaucoup M. de Schulembourg, ne devait tenir aucun compte de cette recommandation.

Et puis il se bat, il entasse les aventures et les triomphes, brûle sa vie, comme s’il craignait de mourir avant d’avoir tout éprouvé. Dans cette course, on le voit par minutes passer à des endroits où il semble que des ombres veillent et l’attendent. Il recommence des gestes anciens…

Quatre-vingt-quinze ans après Christophe-Jean de Kœnigsmark, il prend Prague. Lui avait-on