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dresde

dent pas le chef d’orchestre, ne s’immobilisent jamais pour attaquer plus confortablement une note difficile, mais vont et viennent, bougent, gesticulent. Ils ont autant d’énergie comique qu’en montraient autrefois nos acteurs dans ces farces où toute la troupe poursuivait infatigablement un malheureux homme en caleçon. Le dialogue de la pièce est très rapide, ces gens chantent comme on parle, avec une aisance, une souplesse incomparables ; et ils jouent constamment, qu’il soient dans l’action immédiate, ou qu’ils figurent. Personne n’« attend son tour », chacun écoute, regarde, s’intéresse, vit ardemment.

Et les décors, quels chefs-d’œuvre ! La chambre toute dorée du premier acte, où la lumière est blonde ; et la ravissante pièce blanche du second acte, qui laisse voir lorsqu’entre le Chevalier de la rose, un escalier très pareil à celui du château royal de Dresde. Et quelles harmonies de costumes ! Les admirables laquais jaune et argent, le négrillon rose, et certaine jupe d’un vert pointu, seule note âpre parmi les fines colorations tendres. L’actrice qui porte cette jupe au ton irritant ne manque pas une occasion de la rapprocher, — et nullement par hasard — des rouges qui se rencontrent là. Tout est combiné pour un plaisir total de l’esprit et des yeux.

L’aventure se passe à Vienne, je crois. Pour moi, c’est Dresde qu’elle raconte ce soir. L’âme de l’exquise ville s’y ramasse toute, y soupire un peu, y rit surtout.

On trouve dans cette histoire une maréchale fort