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seulement, après Werther il y a Faust qui, ayant tout essayé, tout pensé est si mortellement las. « Aucune volupté ne le rassassie, aucun bonheur ne le satisfait. » Et à la fin, du sommet de la connaissance, il crie : « Nature, que ne suis-je qu’un homme, rien qu’un homme devant toi ! Ce serait alors la peine de vivre ! » Faust règne sur toute la maturité et la vieillesse de Gœthe. Entre l’ébauche de la première partie et l’apparition de la seconde, plus de quarante ans s’écoulent. La prodigieuse inquiétude du philosophe et l’âcre négation du personnage diabolique ont été jusqu’au bout présentes dans son cœur. Dans l’une des scènes de la fin, Faust se croit seul parmi les ténèbres de minuit. Mais des formes indistinctes bougent tout à coup, et parlent. L’une entre, s’approche : « Qui es-tu ? » demande-t-il épouvanté. Et elle répond seulement : « Je suis là » — c’est le Souci…

Quand Faust épouse Hélène, nous croyons que le tourment de son esprit va s’apaiser définitivement. Mais point. Conjoints, le doute fébrile, curieux, de l’âme moderne et l’auguste sérénité de l’âme antique ont été féconds. D’Hélène et de Faust un fils naît, le sublime enfant de joie : Euphorion. Mais Euphorion meurt très vite et Faust reprend sa route, Méphistophélès à ses côtés. Enfin il va trouver la paix peut-être, car il est sûr de faire le bonheur des hommes. Il veut dessécher des marais, répandre la santé, la joie… Il meurt. Le marais n’est pas desséché, les hommes ne sont pas plus heureux, c’est l’ironie dernière, la plus désespé-