Page:Buies - Le Saguenay et le bassin du Lac St-Jean, 1896.djvu/310

Cette page a été validée par deux contributeurs.

par les âges, à la suite de ce hoquet formidable du globe qui rejeta subitement à sa surface tant de matières entassées dans son sein ; nous avons vu le grand cataclysme écrit d’une main frémissante, en caractères qu’aucun œil humain ne saurait méconnaître ; nous l’avons vu comme un grand livre ouvert d’où l’évidence jaillit avec impétuosité, et notre esprit, agité de puissantes émotions, s’est laissé emporter à vouloir peindre cette heure terrible où la nature entière sembla s’abimer dans le chaos. Qu’on nous pardonne cette audace puérile qui a cependant une excuse ; c’est que nous aimons tant notre sujet que nous ne mesurons pas nos tentatives aux forces qu’il exige ni à la grandeur qu’il renferme, et que nous faisons de notre mieux, content de voir notre faiblesse même servir à le rehausser encore et à le faire valoir davantage.


II


Le lac Saint-Jean s’étendait jadis à l’est jusqu’aux montagnes qui bordent la rivière Sainte-Marguerite et qui sont les plus hautes de toute la région du Saguenay. Au nord il baignait une autre chaîne de montagnes, relativement basses, qui se trouve à environ quarante milles au delà du rivage actuel. Il en était de même à l’ouest ; mais néanmoins, l’ancien rivage du sud était beaucoup moins éloigné que les autres, parce que la chaîne de montagnes de ce côté est bien plus rapprochée des bords du lac moderne que celle du nord, et elle est en outre