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terrible des éléments qui semble avoir été arrêté dans son cours et pétrifié sur place ? Pourquoi ce phénomène, en tant d’endroits répété, qui proteste contre l’œuvre patiente de la nature, contre son action régulière et naturelle ? Ah ! assez de questions, assez d’interrogations dressées devant le vaste problème que nous avons sous les yeux ; sachons y plonger nos regards sans plus longtemps le redouter, sans une confiance trop grande dans la perspicacité de l’esprit qui distingue les causes dans les effets et se les explique, mais aussi sans aucune crainte puérile, avec la détermination de découvrir les secrets de la nature, et de les révéler en les démontrant victorieusement, dès que nous croirons suffisamment les tenir.

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Ce que nous voyons aujourd’hui du lac Saint-Jean, cette petite mer intérieure de douze lieues de long sur neuf de large, presque ronde, qui ressemble, avec ses rivières, à un vaste crabe étendant ses pattes dans toutes les directions, n’est rien qu’une miniature de ce qu’il était jadis. Ah ! jadis nous voulons dire il y a des milliers et des milliers d’années, c’était pour le Lac les beaux jours ! Alors, il était grand, profond, superbe, et les tempêtes devaient le faire mugir avec fracas sur la ceinture de montagnes qui lui servaient de rivage et lui faisaient un cadre de quatre-vingt-dix lieues de circonférence. Alors, il avait aussi lui ses abîmes, il couvrait