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paysage le plus étrange qu’il soit donné de voir dans ce pays étrange entre tous.

Si l’on veut abréger quelque peu sa route, on pourra se rendre directement de Chicoutimi à Saint-Dominique, et de là gagner le grand chemin de colonisation, à l’extrémité ouest du Grand-Brûlé, par un autre chemin qui suit à peu près le cours de la petite rivière au Sable, entre le lac Kenogami et la rivière Saguenay. Mais autrefois, on n’avait pas ce choix ; une seule voie était ouverte au voyageur, au trappeur et à l’Indien ; il fallait absolument suivre la rivière Chicoutimi et faire sept portages, le canot sur le dos, avant d’arriver au lac Kenogami, ce merveilleux étang de mille pieds de profondeur qui semble être, par sa forme allongée et étroite, une sorte de fente pratiquée vivement à la base d’une chaîne montagneuse.

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La rivière Chicoutimi, depuis le portage des Roches où elle reçoit les eaux du lac Kenogami, jusqu’à l’endroit où elle débouche dans le Saguenay, a un cours tortueux d’environ dix-sept milles de longueur, entre des rives peu élevées qu’elle ronge incessamment et sur lesquelles, au printemps, elle déborde, en leur arrachant des monticules entiers de sable et en renversant tout ce qu’elle trouve sur son passage. Elle ne commence à être navigable en canot qu’à deux milles et demi de son embouchure, après un