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chemins, ouverts dans le schiste et le gravier, ont rayé de quelques lignes plus douces et ont apaisé la rude physionomie de la colline ; ils mettent l’évêché en communication avec les autres édifices qui se sont groupés au hasard du terrain sur les reliefs du versant, et procurent aux penseurs et aux savants professeurs du collége des promenoirs incomparables pour se livrer à des méditations qu’aucun bruit, qu’aucun regard ne trouble. Immédiatement à la suite de l’évêché, s’offre un tournant qui permet de suivre au loin, bien au loin le sombre ruban de la rivière Saguenay, captive entre ses hautes et massives berges, qui la regardent, les sourcils toujours froncés, et la resserrent et l’étranglent de plus en plus, jusqu’à ce qu’elle finisse par ne plus paraître, dans la perspective fuyante, que comme un mince filet d’eau allant s’engloutir dans les entrailles de la terre.

C’est Mgr N. Bégin qui a fait construire l’évêché de Chicoutimi, durant son court épiscopat qui ne s’étendit que de 1888 à 1891. C’est un beau et large édifice, en pierres et en briques, qui semble refléter l’esprit et le cœur de son fondateur. Il a gardé du prélat la physionomie accueillante et semble dire au passant soucieux de ne pas hésiter à franchir son seuil, qu’il n’entendra que des paroles amies, de douces exhortations et des consolations qui ne seront pas banales, pour son âme peut-être ulcérée par le spectacle de l’éternelle sottise humaine, bien plus douloureux encore à contempler et à subir que celui de la méchanceté elle-même.