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nombre se trouvaient plusieurs familles qui venaient s’établir au Saguenay, mais uniquement avec l’intention de « faire la pinière », comme on disait alors. Chacun se construisit du mieux qu’il put une petite maison en bois rond et couverte d’écorce de bouleau, n’ayant que quelques ouvertures étroites pour laisser pénétrer la lumière.

À la chute des premières neiges d’automne, les hommes se hâtèrent aux travaux des bois et commencèrent leurs chantiers. Ils bâtirent même un moulin à scies pendant l’hiver.

Les jours de travail passaient rapidement, tant les pionniers mettaient d’ardeur dans leur entreprise, et l’ennui ne venait guère les tourmenter alors qu’ils avaient la hache à la main. Mais les jours où cessent les labeurs et qui sont consacrés à Dieu avaient perdu pour eux tous leurs charmes. Les dimanches se levaient tristement, sans apporter aucune de ces heures où les loisirs sont si bien remplis dans nos paroisses de vieille fondation. Pas de voisins à visiter ; pas de réunion le soir chez quelque bonne famille amie ; le foyer était déserté là-bas de même qu’on était isolé ici, entouré par l’implacable et sombre muraille des forêts qui mettait une distance de vingt-cinq lieues entre le village où l’on avait vu le jour, où l’on avait grandi, et le chantier morne dont les bruits maintenant se taisaient, dont tous les échos s’étaient subitement enfuis.

Puis la mort vint : elle frappa deux victimes qui expi-