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approximativement l’existence et l’étendue primitives de ces baies par la nature et la configuration du sol.

À l’heure du cataclysme, toute l’eau, qui baignait cette région maintenant à sec, forma, en s’engouffrant dans la crevasse de mille pieds de profondeur, tout à coup entr’ouverte, un énorme torrent d’environ vingt milles de largeur sur une profondeur de cinq cents pieds, lequel entraîna avec lui une énorme quantité d’alluvion et d’argile qu’il déposa au hasard partout où il ne trouva pas d’obstacles. C’est ainsi qu’il remplit tout l’espace compris entre la baie Ha ! Ha ! et le lac Kenogami, parce qu’il n’y avait là que de la terre ; cependant il y est resté çà et là quelques petits lacs. Ceci explique comment la baie Ha ! Ha ! se trouve soudainement interrompue ; la crevasse en cet endroit a été bouchée par les éboulis, et les matières qui étaient apportées pêle-mêle ont été plus tard nivelées par les grands courants qui venaient de la partie supérieure.

Tout le monde sait que le nom de Ha ! Ha ! donné à cette baie vient de la surprise du voyageur à la vue de ce détour subit du Saguenay se terminant en un bassin profond, par endroits, de huit à neuf cents pieds, et qui n’a aucune issue. Et pourquoi pas d’issue ? C’est que la Grande Baie n’est pas du tout un bras du Saguenay qui s’en détourne brusquement ; c’est, comme nous l’avons dit, le commencement d’une autre crevasse qui s’est faite depuis le cap à l’Ouest jusqu’au lac Saint-Jean. Cette crevasse, remplie par