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manifeste ici ; il y a comme une espèce de sensation magnétique qui avertit de la proximité d’une grande masse d’eau sur laquelle les vents jouent en liberté ; l’air est plus pur, plus vivifiant, plus sonore ; il s’emplit de plus de vibrations, et l’âme en reçoit comme une impression d’éveil et d’accroissement de vitalité dont il est impossible de ne pas reconnaître la cause. Le lac Saint-Jean, du reste, a son influence et des effets qui lui sont propres. Éloigné dans l’intérieur du pays, il produit sur les populations qui l’entourent l’illusion de la mer ; il les attire, les fascine et les relient par le charme unique qu’il apporte dans la monotonie du pays qu’il arrose.

Pays monotone, soit, mais excellent pour y vivre de longues années. C’est un milieu dans lequel tous les besoins factices disparaissent et où la santé compromise se refait. Les colons sont contents de leur sort et vivent de peu. Ils s’étonnent quand vous leur offrez de l’argent en échange de leur hospitalité. Ils sont une race admirable, d’un courage et d’une persistance uniques. Au milieu d’eux on se trouve transporté dans un monde qui ne ressemble pas du tout au reste du Canada. Placés pour ainsi dire au sein de la nature, ils apprennent à la connaître tous les jours ; ils y apprennent les secrets de l’hygiène et de la conservation de la vie, et, sous ce rapport, ils peuvent en remontrer à bien des gens de la ville. Ce serait le devoir impérieux du gouvernement de